Troyes et l'Aube précurseurs



Force à tondre la laine des moutons et guérison du tournis des moutons


Force à tondre
Force à tondre

Force à tondre la laine des moutons

 

        En décembre 1839, M. Pillard-Tarin donna le fruit de sa découverte à la Société d’Agriculture, Sciences, Arts et Belles-Lettres du département de l’Aube : « Ce nouvel instrument, avec sa forme courbée, présente non seulement un avantage marqué pour la facilité de la tonte, et procure encore celui de ne point couper ni piquer les bêtes (ce qui arrive trop souvent avec les forces ordinaires), et son dos brisé permet à l’ouvrier de serrer à volonté les 2 taillants, suivant la dureté, la souplesse ou l’épaisseur de la toison, et en facilite beaucoup le repassage.

 

         Je reçus les premières ouvrières tondeuses, qui trouvèrent au premier moment cet instrument si joli, si mignon comparativement à ceux dont elles font usage, mais blâmé presque aussitôt, comme il arrive fréquemment dans toutes les innovations, surtout quand on ne sait pas se servir des instruments et que l’on n’est pas familier avec eux. Je mis successivement 5 personnes à l’œuvre, qui toutes le condamnèrent et trouvèrent les leurs bien supérieures !

 

         Cependant une d’entre elles, plus intelligente, après s’en être servi pendant 5 minutes, me dit : « Je m’en servirais bien, je ferais du bel ouvrage, mais il me semble que je n’irais pas si lestement qu’avec mes forces ». « Continuez, lui répondis-je, vous savez que je tiens plus à la qualité qu’à la quantité ». Elle continua et, au bout d’un quart d’heure, ce n’était plus le même langage : le mouton était tondu, la partie faite avec le nouvel instrument était comme rasée, nullement piquée, et l’ouvrière tellement enchantée, qu’elle me pria de la lui laisser pendant qu’elle resterait à la maison.

 

         L’élan une fois donné, toutes se l’envièrent et en reconnurent tellement la supériorité que 6 d’entre elles me prièrent de leur en faire à chacune une paire.

 

         Après cette expérience, il me reste parfaitement démontré que cet instrument l’emporte de beaucoup sur tous ceux connus jusqu’à ce jour, et qu’en s’en servant l’on a l’avantage de recueillir plus de laine, d’avoir un ouvrage bien fait, de ne point piquer les bêtes et d’aller plus lestement.

 

         J’engage donc les propriétaires de troupeaux à s'en procurer (le modèle est déposé au musée), afin qu’au moment de la tonte prochaine ils puissent mettre en main à leurs ouvriers un instrument qui, sous les rapports de l’économie et de la perfection de l’ouvrage, ne laisse rien à désirer ».

 

 

Guérison du tournis des moutons

 

        M. Pillard-Tarin fit une deuxième communication.

 

         « Les moutons sont exposés depuis l’âge d’un an à deux, à une maladie appelée le « Tournis », occasionnée par l’hybride polycéphale qui occupe la partie droite ou gauche de la tête, refoule la cervelle dans l’autre partie, force l’animal à diriger l’œil, qui est du côté occupé par l’hydatide, constamment fixé sur la terre, le fait tourner comme sur un pivot, l’empêche de manger et le fait mourir au bout de 2 à 3 mois. Cette maladie, qui nous enlève quelquefois des bêtes extrêmement précieuses, n’est pas guérie, quoique connue, et aucun propriétaire n’en connaît le remède. J’appris qu’il y avait un berger qui est en service dans la commune de Villechétif, qui opérait et guérissait les moutons atteints du tournis. Je l’envoyai chercher. Après avoir examiné la bête, il la prit, pressa le crâne qui s’amollit où se trouve l’hydatide et me dit : « Il n’y a pas longtemps qu’elle est atteinte, car le crâne ne fléchit nullement, et je ne sais si je réussirai, mais comme l’animal est pour mourir, nous ne devons pas hésiter ».

 

         Il tondit le côté affecté, lui enleva la peau d’un pouce carré, nettoya bien le crâne des chairs qui le couvraient et, à l’aide d’un couteau pointu et bien coupant, lui fit un trou en entonnoir de manière à n’avoir que de quoi passer la tête d’une épingle à la partie interne. Le crâne percé, il chercha avec la tête de l’épingle à détourner tous les filaments qui pouvaient recouvrir l’hydatide, et lorsqu’elle fut dégagée, il me la montra en me disant : « Votre bête est sauvée et j’en réponds ». Effectivement l’hydatide dont la peau blanchâtre ne se découvrait grosse que comme un grain de navette, se trouvant dégagée et ayant jour pour se développer, sortit par ce petit trou et devint grosse à l’extérieur comme une noix. Alors il la perça et il en sortit de l’eau au moins de quoi remplir un œuf de poule. Il prit ensuite l’enveloppe de l’hydatide, la tira avec précaution et parvint à l’extraire en entier. Après quoi il prit un morceau de poix dont il forma un emplâtre qu’il appliqua dessus, et qu’il maintint au moyen de petites bandelettes de linge dont il recommanda l’enlèvement au bout de 8 jours. L’opération terminée, on lâcha l’animal qui se rendit à son écurie dont nous étions à plus de 100 pas (lui qui auparavant ne pouvait la trouver à 2 pas). On le lâcha dans le verger et il se mit à manger. M. Salmon, le directeur de notre ferme-modèle m’a dit en avoir vu opérer à l’école d’agriculture de Grignon (fondée en 1826 par le roi Charles X), plus de 60, sans jamais en avoir vu sauver un seul, tandis que les 3 opérés à Villechétif sont parfaitement guéris ! ».


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