Autres célébrités



La Louptière, poète champenois


 

Connaissez-vous M. de la Louptière, le poète champenois ?

 

        Jean-Charles de Relongue de la Louptière, chevalier, seigneur de la Louptière, de l’Académie des Belles Lettres des Arcades de Rome, nait le 16 juin 1727, dans l’Aube, au château de la Louptière.

 

     Une muse inconnue, Mademoiselle Julie de la Croix, a composé un quatrain en son honneur :  

 

            « Cet auteur que tu voies a consacré ses veilles

 

            A l’art des vers ingénieux.

 

            Il sait trop charmer les oreilles

 

            Pour n’être pas cher à nos yeux ».

 

            M. de la Louptière a fait graver ce compliment avec son portrait en tête de ses œuvres.

 

            En 1765, il fait publier 2 petits volumes : « Poésies » et « Œuvres diverses ». Il a surtout cultivé les poésies fugitives, il a écrit pour les dames et les demoiselles, à qui il dédiait ses stances, ses couplets, ses madrigaux, ses chansons. C’est un type d’auteur frivole, galant, sémillant, un « versificateur de boudoir »… Il est charmé de faire partie de l’Académie de Châlons, comme de l’Académie des Arcades de Rome.

 

            Il s’intitule fièrement le « Poète Champenois ».

 

            Il est rédacteur du « Journal des Dames », et a essayé de décrire le village où il était né, de faire parler les paysans, au milieu desquels il a souvent vécu, et de nous faire connaître quelques traits de la vie champenoise du XVIII° siècle.

 

            Le village de La Louptière où il était né, en 1777, à l’époque où notre poète en était le seigneur, naissait dans une obscure demeure de ce village, le fils d’un paysan qui devait s’appeler un jour le « baron Thénard » (voir ce chapitre), ce nom qui est  officiellement  accolé à celui de la Louptière.

 

            M. de la Louptière a fait le portrait d’un modeste curé de campagne, qui parait tracé d’après nature. Le tableau a le mérite de faire revivre à nos yeux un village champenois du XVIII° siècle. Tout s’y trouve, la vieille tour du manoir seigneurial, le pressoir banal, les tilleuls sous lesquels on danse, les métairies, les cabanes rustiques, le presbytère et l’église. Le poète  ne se contente pas de décrire son village : il l’aime. Il n’hésite pas à lui dire :

 

            « La Louptière, tu vaux tous les pays des fées ;

 

            Je serai toujours moins jaloux

 

            De chanter avec les Orphées

 

            Que de hurler avec tes loups ».

 

            La Louptière ne se contente pas de faire parler les paysans, il parle aux paysannes : c’est lui qu’il met dans ses stances d’« Un jeune seigneur à une jolie paysanne ». Le jeune seigneur est très tendre, mais il connait son rang, et il dit à la jolie paysanne :

 

            « Le sentiment s’élève au-dessus de ton être ».

 

            La jolie paysanne, dans son costume rustique, n’en n’est pas moins séduisante. C’est l’avis du jeune seigneur :

 

            « Si notre penchant doit dépendre

 

            De l’élégance des habits,

 

            Ton corset de crépon, ta cotte de calmande

 

            Ne valent-ils pas bien leur prix ?

 

            Sur ton front ingénu, ta cornette à dentelle

 

            Répand de nouveaux feux… ».

 

            Il y a là un portrait vrai d’une jeune paysanne champenoise au XVIII° siècle.

 

            Au point de vue de la couleur locale, de la vérité provinciale, le recueil des œuvres poétiques de M. de la Louptière mérite d’être parcouru.

 

            Notre poète qui parlait en termes si choisis aux paysannes, aimait à faire parler les paysannes dans leur langage rustique, lorsqu’elles devaient complimenter les grands. C’est ainsi qu’il rédigea les vers de 3 couplets  qui furent chantés à l’arrivée de la duchesse de Montmorency au château de Gouaix, c’est ainsi qu’il fit le remerciement des habitants de la Louptière à l’archevêque de Sens, qui était venu leur donner la Confirmation :

 

            « Salut à votre Eminence !

 

            Grand merci d’son bon soufflet.       

 

            J’devons pardonner l’offense,

 

            Nous v’là Chrétiens tout-à-fait.

 

            La joue en cuit comme braise,

 

            J’en avons pas de regret ;

 

            Aux Fidèles de vot’ diocèse

 

            C’est le seul mal qu’vous avez fait ! ».

 

            Un acte de sa vie qui dénote chez M. de la Louptière un travail suivi, c’est d’avoir été rédacteur en chef du « Journal des Dames », fondé en 1759 et qui vécut jusqu’en 1777. Il voulait plaire à tout le monde. « Je ferai en sorte, dit-il dans son prospectus, que sans perdre de la galanterie qui lui convient, le « Journal des Dames » puisse être lu par une fille sous les yeux de sa mère ».

 

            A 38 ans, il finit par se marier avec une fille noble de sa province. Désormais, M. de la Louptière n’adressa plus des vers qu’à sa femme, à sa mère, à son fils. Il eut en 1768 un second fils, le premier avait à peine vécu. Il l’appela Jean-Jacques, à cause de Jean-Jacques Rousseau.

 

            Il appartenait à une famille noble, assez nombreuse : il avait 3 frères, dont l’un, le chevalier de Relonge, était officier, il avait 3 sœurs qui étaient entrées par d’honorables alliances dans les familles de Vaubercey, d’Alençon et de Vienne. La plupart des membres de cette noblesse champenoise, manquaient parfois d’argent. Ainsi sa femme était réduite à lui faire une pension alimentaire à l’époque de sa mort, en 1784, au château de Courmononcle (voir ce chapitre).

 

            Pauvre M. de la Louptière ! Lui qui avait tant chanté les femmes, lui qu’elles avaient si souvent adulé, aurait-il pu prévoir que 2 femmes, qui lui avaient été les plus chères, se disputeraient le droit de ne pas payer les dépenses de ses derniers jours !

 


Sur le bandeau du  bas de chaque page, vous cliquez sur "Plan du site", qui est la table des matières, et vous choisissez le chapitre qui vous intéresse. 

Cliquez sur "Nouveaux chapitres"  vous accédez aux dernières pages mises en ligne.


Rechercher sur le site :