Visites importantes


Charles VIII


Louis XI décède le 30 août 1483. Cet événement est annoncé aux Troyens par 2 lettres écrites d’Amboise ; l’une du 31 août, par son fils, qui fut roi sous le nom de Charles VIII, et l’autre le 1er septembre par Pierre de Bourbon gendre de Louis XI. Ces lettres apportées par un chevaucheur de l’écurie du roi, n’arrivèrent à Troyes, que le 14 septembre. Charles VIII demande des prières pour son père. Charles VIII, en annonçant la mort de son père, invite les Troyens à rester unis et soumis à son obéissance, et de manière que chacun vive en sûreté, repos et tranquillité. Vivant ainsi, il les aura « en spéciale et singulière recommandation, comme ses bons, vrais et loyaux sujets ». Le jeune roi, par une lettre aux élus, décharge les habitants de Troyes du paiement des tailles pour le quatrième quartier de l’année. Le 24 septembre 1483, les Troyens répondent au roi. Ils le remercient de la remise qu’il leur a accordée sur les tailles. Ils l’informent de la célébration d’un service funèbre pour le repos de l’âme de son père. Ils ont pourvu à la garde de la ville, avant la signification du décès du feu roi et aussitôt qu’ils en ont eu la nouvelle certaine. Des députés seraient déjà en route, si ce n’était « un peu de peste qui a cours en ville, mais qui s’apaise ». La ville fait, peu après, par ses députés, son serment d’obéissance au jeune roi. Elle obtient une exemption d’impôts sur les menus vivres et sur la boucherie. Elle fait confirmer ses privilèges d’arrêt ainsi que deux des foires, de l’exemption de toute garnison et de la  suppression, à leur grande satisfaction, de la charge de capitaine de la ville. A l’occasion de la lutte du duc d’Orléans, Charles VIII, le 18 janvier 1484, informe les habitants de Troyes de la division survenue  entre lui et le duc d’Orléans.  Le roi invite les Troyens à demeurer unis et fidèles à la Couronne, et à lui envoyer 2 députés, afin de l’instruire de ce qui se passe à Troyes. Il est décidé que la ville « demeurerait ferme dans son obéissance au roi, et que les Troyens seront exhortés à prier Dieu pour la prospérité et la santé du roi et pour la paix et union du royaume ». En décembre 1485,  le roi annonce qu’il envoie à Troyes une garnison de lansquenets. Persistant dans l’exécution de ses lettres de privilège, le conseil s’excuse, près du roi, de ne la point recevoir, et demande une exemption des gens de guerre, tant à cause des privilèges, qu’en raison des charges qui pèsent sur les habitants. De suite, le conseil fait fermer les portes de la Madeleine, de Comporté et de la Tannerie, afin de compter plus facilement les gens de guerre entrant en ville. En 1486, Charles VIII met le comble à la bonne fortune des Troyens en venant les visiter lui-même, pour un séjour de plus d’un mois. Le roi, accompagné d’une nombreuse suite de seigneurs, des gens de son conseil et d’une compagnie de ses gardes, quitte Paris dans les premiers jours de mai. Le 11, le roi arrive à Saint-Lyé, et passe la nuit au château. Le lendemain au matin, il se met en route pour Troyes. L’évêque, accompagné du clergé, le lieutenant général du bailliage et tous les officiers de justice, les conseillers, les praticiens, notaires et avocats, ainsi que le prévôt « revêtu d’écarlate », les sergents royaux, en belle livrée, les échevins, tous à cheval et portant des robes rouges, suivis des nobles, bourgeois et marchands, tous à cheval, vont au devant du roi jusqu’à Pouilly, où se fait la rencontre. L’évêque harangue le roi, l’assure de l’obéissance et de la fidélité des habitants et lui présente les clefs de la ville, puis le cortège se met en marche et arrive au prieuré de Saint-Antoine, où il est de nouveau harangué par le plus ancien d’entre les religieux. Le roi et les principaux personnages de sa suite dînent à Saint-Antoine. Après le dîner, l’évêque et tous les gens d’église, en surplis et en chapes, portant les croix et les reliques, avec les habitants et les officiers royaux, vont recevoir le roi à la porte du Beffroi. Les rues qui doivent être parcourues par le cortège royal, sont parées de tapisseries et de draps de soie, couvertes « de mais » et jonchées de verdure. Sur ces riches tentures sont « affichées plusieurs histoires en l’honneur et à la louange du roi ». Différents « mystères et personnages » sont représentés pendant la marche du cortège. Celui qui est joué à la Porte de Paris, représente le petit David terrassant d’un coup de fronde le géant Goliath, auquel il tranche la tête. Cette scène démontre que le roi, quoique jeune, terrassera ses ennemis. Dans « des mais » nombreux, sont placées des cages remplies d’oiseaux chantants. Tout près de là sont de belles jeunes filles, faisant des bouquets, qu’elles offrent au roi et aux seigneurs de sa suite, et qui, accompagnées par "une" orgue « chantent belles chansons en l’honneur du roi ». Une de ces jeunes filles tient un tableau où se lisent 8 vers exprimant la joie des filles de Sion à la vue de David. Ce groupe de jeunes et jolies filles démontre que Troyes est « ornée de plusieurs corps de saintes Vierges, patronnes et protectrices de la ville ». A la même porte, est aussi représenté le mystère de la Trinité, sur un échafaud, d’où descendit, vers le roi, un ange, qui lui présenta une croix d’argent. Ceci rappelait qu’un ange apparut à Constantin, auquel il remit une croix, en lui annonçant qu’à ce signe il serait vainqueur. Cette trinité signifie encore que Troyes est une cité unie, dont l’origine remonte à l’existence de 3 châteaux et que, par comparaison, elle est appelée : « Totius Trinitatis nobile Triclinium ». Au dessus du mystère de la Trinité est arboré un étendard chargé d’un écu aux armes de France. De la porte de Paris, le cortège se met en marche. Les gens d’église tenant la tête, après eux les bourgeois et les marchands, le prévôt et les sergents, « Monsieur de Troyes (l’évêque) monté sur une mule bien dressée ». Le lieutenant général, les officiers de justice, notaires et praticiens, les gardes du roi, vêtus de brigantines, de beaux hoquetons à mailles argentées, armés d’arcs et de flèches et aussi d’épées ou braquemards (épées à 2 tranchants), et coiffés de salades ou capelines, marchent ensuite. L’étendard du capitaine de la garde écossaise, long d’une toise et aux 3 couleurs : rouge, blanc et vert, et qui porte, dans le champ, un saint Michel, et au-dessus un soleil d’or, puis les trompettes et les clairons. En avant du roi marchent 24 sauvages, dont les habits sont faits et couverts de toile et de chanvre mâle, et jetant des fleurs devant le roi, puis le roi, monté sur un magnifique cheval noir, 4 échevins, vêtus de leur robe « d’écarlate (étoffe de laine fine et de couleur rouge) et de satin », portent un dais au dessus du roi. Ce dais est de fin drap d’or luisant et les lambrequins sont entremêlés d’or et d’azur. Le cortège royal passe par la rue des Trois-Têtes, et, en face de l’hôtellerie des Trois Visages, sont réunis 200 enfants âgés d’environ 6 ans, vêtus de rouge, coiffés d’un chapeau blanc, et assis sur un échafaud. Ils crient : « Noël ! Noël ! ». Sur la place du Marché-au-Blé, est « la fontaine des Trois-Pucelles » jetant par les seins, du vin de 3 couleurs, où chacun peut boire. Au-dessus de la fontaine est une estrade où se tiennent « ménestriers et trompettes ». Sur l’étape au vin, un échafaud est chargé d’enfants, vêtus en violet, criant : « Vive le Roi ! ». Place de l’Hôtel de Ville, s’élève un échafaud sur lequel est représentée une Fleur de Lys au naturel « de laquelle sort un fort beau roi, vêtu de drap d’or et paraissant âgé d’environ 10 ans ». Une jeune fille, vêtue de damas blanc, du même âge que le roi, présente son cœur à celui-ci, tandis qu’une autre joue des orgues et qu’une troisième jeune fille « administre les vents à sa compagne ». Plus loin, est placé l’arbre des rois, parmi lesquels est représenté saint Louis,  en chape de drap d’or. En face de l’hôtel du Cygne est un groupe d’enfants criant : « Vive le Roi ! ». Près de la place Saint-Pierre se trouvent l’évêque et le clergé. Au-dessus de la porte de la cathédrale, est un pavillon fort riche, semé de fleurs de lys « en forme de tente de guerre ». Sous ce pavillon, est placé un roi, accompagné de 7 géants « ce qui signifie le pavillon de la paix ». Charles VIII, arrivé près de l’église, met pied à terre. Il est reçu par l’évêque, entre dans l’église, y fait sa prière, au pied du grand autel. Après le Te Deum, chanté au son des cloches et avec l’accompagnement des orgues, le roi remonte à cheval, puis il est conduit au Palais-Royal, « édifice spacieux, fort ample et de grande noblesse, touchant à 4 églises : St-Etienne, Notre-Dame, les Jacobins et l’Hôtel-Dieu. Charles VIII s’installe au Palais-Royal, et sa suite est logée chez les habitants. La ville fut éclairée pendant les 8 premières nuits du séjour du roi, et, dans la soirée où il revint de Torvilliers, où il avait chassé. Il assiste chaque jour aux offices à la collégiale de Saint-Etienne, chapelle royale. Un oratoire est élevé dans le chœur pour le roi et l’église est décorée, tous les jours, de mais et de joncs. Le 25 mai, il assiste aux cérémonies de la Fête-Dieu, et il est encore à Troyes le 15 juin.

La ville de Troyes obtient d’abord la suppression de l’une des charges qui pesait le plus lourdement sur ses habitants : l’exemption et l’affranchissement de toutes les tailles et de tous les impôts qui, à l’avenir pourraient être levés, soit pour l’entretien des gens de guerre, soit pour toute autre cause. Cette faveur est motivée par la conduite des Troyens en 1429 et en raison de ce que depuis la rivière de Loire, après les sièges d’Orléans et de Montargis, la ville de Troyes fut la première qui, sans contrainte ni difficulté, reçut Charles VII, l’aïeul du roi, et l’accueillit comme son « droiturier » et souverain seigneur : cette soumission, ayant amené la réduction des autres bonnes villes de Champagne et d’autres du royaume, et Charles VII, ayant pu se rendre à Reims et s’y faire sacrer. L’enregistrement des lettres n’eut lieu à la Cour des Comptes que le 16 mars 1488 et, peu après, la ville et ses habitants ne furent pas moins frappés d’impôts que par le passé !! Charles VIII  établit à Troyes 2 nouvelles foires, outre celles qui existaient anciennement. L’une est la foire chaude et l’autre la foire froide. Ces foires sont fort déchues de leur ancienne importance. Elles sont franches de tous droits et même pendant la quinzaine suivante. Nuls marchands, comme nulles marchandises ne peuvent être arrêtés ni saisis. Tout individu fréquentant les foires, et ses marchandises, sont placés sous la sauvegarde du roi. Pendant le séjour du roi, le clergé se fait exempter du logement des gens de guerre, sauf les cas d’urgente nécessité. Les métiers profitent aussi de la présence du roi et de celle de son conseil, à Troyes, pour faire régler certaines de leurs affaires.

Charles VIII était bien jeune  pour se permettre de telles générosités. Les ministres ne se crurent pas tenus de respecter les caprices « d’un jeune fou de 16 ans », et 5 années ne s’étaient pas écoulées, que les Troyens devaient payer des impositions aussi considérables qu’au temps de Louis XI ! ! !         

  

 

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