Métiers anciens



Plaques ou tacles de cheminées


Aujourd’hui, le terme « plaque » est fort connu du public, mais la tendance actuelle est à l’emploi du mot « tacle ». Mot d’origine germanique et de patois luxembourgeois, qui désigne les plaques de fonte de fourneaux.

 

La cheminée ne devint un élément de décoration que sous les règnes de Charles VIII et de Louis XI. Ainsi apparurent les premières taques de cheminée dont l’une des toutes premières, date de 1480.

 

Tout d’abord lisses, les taques s’ornèrent, pour les riches châtelains et les féaux du roi, des armoiries seigneuriales. Puis la décoration se généralisa. L’art des fondeurs évoluant avec le goût, celles-ci furent décorées de sujets, religieux, mythologiques, allégoriques, historiques

 

Ce n’est qu’aux environs de 1540 qu’on les voit apparaître pour la première fois dans les comptes royaux. La grande époque de la taque se situe entre 1680 et 1860. C’est durant cette période que l’on fabrique les plus grandes, les plus compliquées et que l’on choisit les sujets les plus rares et les plus divers.

 

La Champagne fut un grand centre français où furent fondues un grand nombre de taques en fonte, principalement en Haute-Marne, comme la Fonderie d'art de Dommartin-le-Franc, qui est devenue un lieu patrimonial avec l'Association pour la sauvegarde du patrimoine métallurgique haut-marnais.

 

Le minerai de fer que l’on décelait dans les sols champenois en de nombreux points et à faible profondeur, a permis l’installation de l’industrie métallurgique dès la préhistoire. D’autre part, nos forêts abondantes fournissaient le charbon de bois nécessaire à l’exploitation. Enfin, les forges primitives se groupèrent naturellement le long de nos rivières, afin d’utiliser la force hydraulique pour actionner leurs soufflets et aussi pour laver le minerai et le débarrasser de sa gangue.

 

Au XVI° siècle, la métallurgie de Champagne fut la plus puissante de France et le restera jusqu’en 1860.

 

La fonderie fut successivement un secret, un art, une industrie. Un grand nombre de taques peuvent être considérées comme de véritables œuvres d’art. Les modèles millésimés sont peu nombreux et n’indiquent que leur date de coulée.

 

Les taques étaient des objets de luxe, donc réservés exclusivement aux demeures seigneuriales ou royales. Comme il se doit, surtout après le fameux édit de 1696 sur l’enregistrement forcé des armes, les seigneurs exigeaient des modèles frappés à leurs armes, ou aux armes de France en hommage « au Roy » qui, selon l’adage était « partout maître chez lui ! ».

 

Au XVI° siècle, les thèmes favoris sont les sujets religieux. Après 1650, les scènes mythologiques et les allégories apparaissent en grand nombre. Cependant, les motifs décoratifs et les armoiries sont toujours utilisés. Le thème d’Apollon et celui du soleil sont choisis tout spécialement pour rappeler la « grandeur » de Louis XIV.

 

Les modèles de style Louis XV sont les plus compliqués. Le sujet, dans un médaillon central, n’occupe qu’une place réduite, la plus grande partie de la face est décorée de rinceaux, rocailles, coquillages, taillis, damiers, arabesques, motifs d’angle, ovales, frises en rond, palmes, pots à feu. Les sujets mythologiques deviennent plus nombreux, alors que les scènes religieuses disparaissent et que les armoiries se font rares. En revanche, on aime décrire des scènes galantes ou bucoliques. Malgré le relâchement des mœurs, aucune plaque de cheminée ne paraît présenter de sujets trop scabreux

 

Durant la première moitié du XVIII° siècle, les formes classiques restent le carré à bord supérieur arrondi ou le rectangle. Par la suite, le bord supérieur présentera des courbes variées.

 

Dans la seconde moitié du XVIII° siècle, à partir de 1765 environ, la taque carrée devient plus petite et surtout moins épaisse.

 

Lorsque les abbayes se dotent de bâtiments modernes et vastes destinés à remplacer ceux du XII° jugés trop sombres et trop bas, les sculpteurs oeuvrent des modèles pour couler des plaques aux armes des abbés, à l’instar des grands seigneurs. On trouvera ainsi de très belles plaques dans l’abbaye de Clairvaux.

 

La Révolution fut une ère de massacre pour ces plaques. Beaucoup de plaques de cheminées ont été détruites à partir de 1793, car, sous la Terreur, le fait d’en posséder une portant des armoiries ou « des signes de féodalité », suffisait pour vous faire classer comme suspect et vous envoyer aux prisons et, de là, trop souvent à l’échafaud !

 

La Convention consacra en partie, 2 séances à ordonner la destruction de ces souvenirs du Régime disparu, dont elle avait horreur et le décret du 18 vendémiaire An II (9 octobre 1793) sur la destruction de ces taques, fut modifié le 22 du même mois. Il est donc probable que beaucoup de personnes en brisèrent, soit par peur, soit par zèle républicain, soit pour le simple plaisir de détruire ! S’il nous est resté quelques unes de ces taques, nous le devons à ce que la Terreur touchait à sa fin. La destruction ne fut bientôt plus exigée. On se contenta de demander à leurs détenteurs de les retourner afin que la face ornée se trouve placée contre le fond de la cheminée. Ainsi la plaque ne montrait plus que son dos nu.

 

Sous le 1er Empire, les taques sont rares. On en trouve quelques unes frappées d’aigles impériaux et d’autres à la gloire de l’empereur Napoléon Premier.  

 

Il faut attendre la deuxième moitié du XIXe siècle pour retrouver des œuvres de grande qualité.

 

On trouve de ces plaques dans presque toutes les maisons champenoises, parfois dissimulées  derrière la maçonnerie de la cheminée moderne. Bien entendu, tous nos nombreux châteaux de l’Aube en détiennent aussi.

 


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