Histoires d'eau



Les noyades



On ne peut parler de tout ce qui concerne l’eau et passer sous silence les noyades qui ont lieu chaque année, du fait de ne pas savoir nager, du mauvais état des berges, ponts ou lisses, d’accidents, d’attentats, de navigation, de natation, de suicide…

 

Pendant l’hiver 1564-1565, les eaux crûrent tellement qu’elles causèrent les plus grands ravages, et plusieurs personnes furent noyées.

 

En 1568, un certain nombre de réformés, hommes et femmes sont tués, puis jetés à l’eau.

 

En 1576, les reîtres jettent des personnes vivantes dans la Seine et dans l’Aube. On trouve des corps accouplés et attachés à des perches.

 

La survie du noyé a de tout temps dépendu de la rapidité et de l’efficacité de l’intervention. En 1831, le maire de Troyes  établit un Conseil de Salubrité. Il considère que la ville de Troyes, en raison de ses nombreux canaux, réclame des établissements de secours destinés à rappeler à la vie les personnes qui auraient été submergées, soit par accident ou par imprudence. Il publie une « Ordonnance de police concernant les secours à donner aux Noyés : il sera établi des boîtes de secours pour les noyés : à l’hôpital,  au moulin de Saint-Quentin, près le pont de la Paix… Ces boîtes renfermeront tout ce qui sera nécessaire pour donner des secours en cas d’asphyxie par submersion. Il y sera joint un brancard, qui puisse servir au transport des noyés, et même, en certaines circonstances, à les placer commodément pour leur administrer les premiers secours dont ils auront besoin. Ces boîtes seront mises sous la surveillance de personnes sédentaires et intelligentes, de manière qu’elles puisent être utilisées en tout temps et à toute heure. Ces personnes recevront une gratification pour leur zèle et surtout par le succès des secours qu’elles auront administrés ». En 1832, le maire édite une « Instruction sur les secours à donner aux noyés : on doit donner des secours à tout individu retiré de l’eau, chez lequel on n’aperçoit pas, au moins, un commencement de putréfaction. Dans les noyés retirés de l’eau peu de temps après la submersion, la vie n’est pas toujours éteinte, elle n’est souvent que suspendue, La couleur rouge, violette ou noire du visage, le refroidissement du corps, la raideur des membres, ne sont pas toujours des signes de mort. Les secours peuvent être administrés par toute personne intelligente… ». Suivent tous les conseils pour rappeler les noyés à la vie : « un ancien moyen consiste à leur introduire de la fumée de tabac dans le fondement... il y a des noyés qu’on n’a rappelés à la vie qu’après 7 ou 8 heures de tentatives… ». En 1845, le sieur Dupuis noie son épouse : il est condamné à mort. En 1883, deux francs sont versés à chacun des deux hommes ayant retiré le corps d’une noyée dans le canal. En 1950, un jeune de 8 ans se penche rue Boucher de Perthes au bord de l’eau, pour mieux voir, mais perd l’équilibre, bascule et est aspiré par l’égout. Le corps de l’enfant est trouvé à 15 m de son point de chute, 4 heures plus tard. En 1951, au pont du mail Dominique, un camion heurte un poteau, dérape, défonce une balustrade et tombe dans la Seine. Ses 4 occupants sont noyés, 3 retrouvés. En recherchant le corps manquant, le caporal des pompiers trouve la mort, un autre est sauvé de justesse. En 1956, une désespérée se jette dans le canal, devant la morgue de l’Hôtel-Dieu. Elle est  repêchée 30 secondes avant qu’elle ne passe de vie à trépas. Cette même année, le fils du directeur du Bureau d’Aide Sociale, 20 ans, se noie à la Sablière à Pont-Sainte-Marie, derrière le Bois du Bon séjour. Le corps n’est retrouvé que le lendemain. En 1958, un père de 3 enfants tombe dans le canal en face de la chapelle de l’hôpital. Repêché rapidement, les pompiers tentent de le ranimer pendant 20 minutes, sans résultat. En 1959, une camionnette plonge dans l’eau d’une profondeur de 4 mètres dans la Seine, sur la route qui relie la Moline à Saint-Julien. Son conducteur parvient à se dégager et gagne la terre ferme. Cette même année, derrière le Cirque municipal, les pompiers plongent pour recueillir au fond du canal des pièces de monnaie avant que des enfants ne s’y risquent eux-mêmes au péril de leur vie. Quelques jours après, un jeune ouvrier se baigne au Moulin de Pétal, rue de la Providence, et se noie. Le corps n’est retrouvé que 3 heures plus tard. En 1960, une jeune fille de 17 ans, se suicide en se jetant dans un puits de la ferme paternelle, profond de 50 mètres, avec 7 mètres d’eau. Le corps est remonté en ½ heure. Une désespérée, acharnée à mourir, se jette une fois de plus dans le canal devant l’Hôtel-Dieu, et près de mourir, elle est repêchée à temps. En 1961, la camionnette de l’ancien maire de Sainte-Maure, défonce le parapet du pont en bois de Fouchy et s’engloutit dans la Seine, à un endroit où le courant est violent, et la profondeur du fleuve de 3 m 50. Le véhicule est retiré, son conducteur a cessé de vivre. Un après-midi de novembre, 3 jeunes dévoyés de 14, 15 et 16 ans, s’échappent d’un centre de redressement près de Dijon, commettent plusieurs méfaits à Troyes et, chaussée du Vouldy, en voulant échapper aux policiers, tombent dans la Seine avec leur véhicule. Ils échappent de justesse à la mort. En 1962, une jeune femme de 26 ans se jette dans un puits profond de 45 mètres avec 10 mètres d’eau, après une dispute avec son mari. Elle laisse deux fillettes de 5 et 7 ans. Le corps est remonté dans l’après-midi. En 1965, une jeune fille de 16 ans se noie dans la Seine, mail des Charmilles. Elle est repêchée en un temps record par un pompier  qui s’est jeté habillé dans une eau glaciale : à 18 h 55, le téléphone sonne au poste de garde des pompiers, à 19 h 15, la suicidée arrive en ambulance à l’Hôpital des Hauts Clos (c’est un double sauvetage, la jeune fille étant enceinte). En 1966, le petit Jean-Patrice Kaminski qui jouait au bord de la Seine, près du pont, devant l’école Auguste Millard, disparaît. On pense à un enlèvement. Les hommes grenouilles n’ont jamais retrouvé le corps de l’enfant. Quelques jours après, les pompiers sont appelés d’urgence à Barberey, car 4 jeunes d’une dizaine d’années sont en train de se noyer. Ils avaient fabriqué pour s’amuser, un radeau avec de vieilles planches et des bidons, et l’essayaient sur la Seine. Le radeau se désagrège et les enfants meurent noyés avant l’arrivée des pompiers. A nouveau à Barberey, un pêcheur en voulant couper avec ses dents un fil en nylon, fait tomber son dentier dans la Seine. Or cet appareil lui a coûté très cher. Les pompiers appelés en urgence, arrivent et en plongeant plusieurs fois, le récupèrent. Son propriétaire le replace aussitôt dans sa bouche, et sans même un remerciement aux sauveteurs, se remet à pêcher !

 

         Terrible drame de la chaleur : le 16 juillet 2014, 2 enfants de 9 et 14 ans meurent noyés alors qu’ils se baignent dans un bras de la Seine, au pont de la Providence, derrière l’ancienne Papeterie Bolloré, lieu interdit à la baignade. Emportés par le fond, ils ne peuvent rejoindre la surface. Dès le lendemain, des gens s’arrêtent, déposent quelques fleurs blanches. Les corps des 2 enfants, originaires de Mayotte, ont été rapatriés sur l’île de l’Océan Indien.

 

         Ce drame a servi de leçon, car, dès le lendemain du drame, un jeune du quartier des Sénardes disait : « Mes petits frères ont l’habitude de se baigner dans des endroits interdits, plus jamais ils n’iront, la leçon a porté ses fruits ».

 

         Une marche blanche a eu lieu quelques jours après.

 

Dès la création du lac de la forêt d’Orient, pendant la période d’ouverture, une vedette de la gendarmerie, un zodiac de la Protection civile, les équipes de surveillance des gendarmes et des pompiers, assurent journellement la sécurité. Le nombre d’interventions au secours des bateaux en difficulté, en détresse et de sauvetages, est impressionnant.

 

Dans les unités de soins intensifs, parmi les enfants hospitalisés pour quasi-noyade, 55 % survivent sans séquelles, 35 % décèdent et 10 % environ survivent avec des séquelles neurologiques sévères. La noyade est la deuxième cause d’accident mortel de 0 à 19 ans, après les accidents de la route, et c’est la troisième cause de mortalité toutes causes confondues, après les cancers et les accidents de la route. On sait que les quasi-noyades sont 3 à 5 fois plus fréquentes que les noyades mortelles, et que les secours portés à des personnes en difficulté dans l’eau sont environ 10 fois plus fréquents que les noyades mortelles.

 

Rechercher sur le site :
René Naboudet
René Naboudet


Sur le bandeau du  bas de chaque page, vous cliquez sur "Plan du site", qui est la table des matières, et vous choisissez le chapitre qui vous intéresse. 

Cliquez sur "Nouveaux chapitres"  vous accédez aux dernières pages mises en ligne.