Les Crimes



Etrange fin du sous-ingénieur troyen


Le 2 octobre 1957, un cantonnier de Luyères, chassant sur le territoire de la commune au lieu-dit « Côte Henrion », découvrait dans un bois reculé un cadavre en complet état de décomposition.

 

Aussitôt, les gendarmes se souvenant de la disparition, le 7 septembre précédent, d’un sous-ingénieur troyen, Pierre Boiffin, 24 ans, travaillant dans une importante firme bonnetière de Troyes, établirent le rapprochement.

 

Cependant, le chef du personnel de l’usine employant Pierre Boiffin, ne reconnaissait pas formellement le défunt : « Si c’est lui, déclarait-il, je ne l’ai jamais vu porter des vêtements semblables ».

 

En revanche, le logeur du jeune homme devait affirmer : « C’est sûrement lui. Je reconnais son pantalon et ses chaussures (plus tard il devait reconnaître son blouson). D’ailleurs, il doit avoir dans ses poches 2 clefs tenues par un anneau. Ce sont celles de son logement ». Les 2 clefs y étaient en effet. Et, bien que rouillées par leur long séjour dans l’humidité de la forêt elles ouvrirent les portes du logement.

 

Il n’y avait plus de doute à avoir : le corps retrouvé par le cantonnier était bien celui du jeune sous-ingénieur stagiaire. Et c’est alors que les mystères allaient naître.

 

En pratiquant l’autopsie, le médecin légiste constata que Pierre Boiffin était mort d’une balle de révolver dans la tête. Le crâne avait été transpercé par un projectile de 9 mm qui, entré par la tempe droite, était ressorti au-dessus de l’oreille gauche.

 

On put aussitôt penser à un suicide, mais un examen plus approfondi devait révéler un fait tout-à-fait troublant qui ne manqua pas de surprendre les témoins de l’autopsie : « la main droite du mort (un droitier) était trouée par une balle entrée sur le côté de la paume et ressortie au-dessus du pouce ». Le malheureux jeune homme avait eu un geste instinctif de protection et la même balle, calibre 9 mm, lui avait traversé la main avant de lui transpercer le crâne. D’autre part, des lésions relevées sur les jambes et dans le dos de la victime laissaient supposer que des violences avaient été exercées sur le jeune homme.

 

Le médecin légiste reconnut que l’on se trouvait en présence d’un crime.

 

Le révolver n’ayant pas été retrouvé sur les lieux, les gendarmes conclurent que l’arme avait été emportée par le meurtrier. Mais le cantonnier apprit aux gendarmes que c’est son frère, chassant avec lui, qui avait ramassé et emporté l’arme. Celle-ci fut en effet retrouvée au domicile du frère. 2 balles restaient dans le chargeur. Mais, d’où provenait l’arme ? Quelques jours plus tard, ayant lu dans la presse la description deurévolver, le fils du logeur de Pierre Boiffin, chef d’escadron en retraite, demeurant à Paris, pensa qu’il s’agissait peut-être du sien. En effet, il disposait chez son père d’une chambre contigüe à celle qu’occupait le jeune sous-ingénieur.  Jouissant de la complète confiance de son logeur, Pierre Boiffin utilisait de temps en temps cette pièce comme salle de détente. Ayant laissé dans cette chambre une arme, l’ancien commandant se rendit à Troyes, constata sa disparition et reconnut le sien que lui montraient les enquêteurs.

 

Présenté par son employeur comme « un garçon charmant, d’un commerce agréable », Pierre Boiffin apparaissait comme ayant un caractère renfermé, anxieux, taciturne. Il menait une existence effacée, membre d’un club de judo troyen ainsi que d’un club de vole à voile, on ne lui connaissait pas d’intimes. Un dimanche récent une jeune fille à scooter et un jeune homme étaient venus le chercher. Il s’agissait de jeunes gens appartenant au club de vol à voile qui ne purent fournir aucun renseignement intéressant.

 

Le logeur de Pierre Boiffin fut le dernier à voir celui-ci vivant en ce soir du samedi 7 novembre 1957 : « Il pouvait être 19 heures, raconta-t-il aux enquêteurs, j’étais sur le trottoir devant la maison quand Pierre arriva avec sa bicyclette. Nous avons échangé quelques paroles banales sur le temps et il est monté dans sa chambre ». Les journalistes rapportèrent : « l’ingénieur dîna puis repartit ensuite avec sa bicyclette, direction les bois de Luyères. Qu’allait-il y faire à une heure aussi tardive ? Y avait-il un rendez-vous secret ?  Dans ses poches on trouva un mouchoir fin, brodé aux initiales « S.O. » qui ne correspondaient pas à celles du jeune homme, ni à celles des personnes de son entourage et de sa famille. D’où provenait ce mouchoir ? Où était passée la douille éjectée par le révolver après le coup fatal ? Car les gendarmes avaient eu beau balayer le terrain avec leur appareil détecteur, ils ne devaient retrouver aucune douille sinon celle qu’ils avaient eux-mêmes éjectée à titre d’expérience. En revanche, la bicyclette du jeune homme devait être retrouvée 4 jours plus tard, à 90 mètres de l’endroit où avait été découvert le corps.

 

Le médecin légiste s’était montré formel en déclarant : « la vermine des bois n’a pu faire dans la main un trou semblable. Il n’y a pas d’erreur, la blessure a été provoquée par un projectile 9 mm. ».

 

Le juge d’instruction, quant à lui, professait l’opinion suivante : « Le suicide est aussi impensable et inexplicable que le crime ».

 

Les années ont passé et l’énigme est restée entière.  

Bois de Luyères
Bois de Luyères
Bicyclette retrouvée
Bicyclette retrouvée


Sur le bandeau du  bas de chaque page, vous cliquez sur "Plan du site", qui est la table des matières, et vous choisissez le chapitre qui vous intéresse. 

Cliquez sur "Nouveaux chapitres"  vous accédez aux dernières pages mises en ligne.


Rechercher sur le site :