Religieux et saints de l'Aube



Jean de Gand, dit Jean de Troyes


Jean de Gand naît à Troyes (certains disent à Rumilly-les-Vaudes) au XIV° siècle.

Jeune encore, l’ermite Jean de Gand se retire dans les montagnes du Jura, où il vit jusqu’à 60 ans, et acquiert une grande réputation de sainteté.

Comme il arrive souvent chez les personnes qui, dans un complet isolement jeûnent souvent, Jean de Gand, jouissant de la réputation de sainteté accordée aux ermites, se met à prédire l’avenir.

Poussé par une inspiration, en 1421, il va à la cour de Charles VII, à Bourges, et lui prédit qu’il sera roi de France, aura un fils, " le premier de ses enfants serait successeur de sa piété et couronné, malgré les brouillements malicieux des Anglais, la connivence de quelques princes de France ". Cela se vérifie l’année suivante, par la naissance du futur Louis XI. Puis l’ermite demande au dauphin s’il désire la paix qui vient de Dieu. " Mon père, répond-il, c’est tout ce que je voudrais et le désire de mon cœur s’il plaisait à Dieu de me la donner et la constituer ferme en moi et mon ennemi l’Anglais ". " Sire, puisque vous désirez la paix, vous l’aurez aussi. Et de plus, Dieu vous donnera victoire contre ceux qui troublent et affligent votre royaume, et vous chasserez les Anglais ". De fait, peu après, Charles propose la paix à Henri.

Jean, ensuite, rencontre le roi Henri V d’Angleterre, qui fait le siège de Meaux. Il se présente comme envoyé de Dieu, et lui dit que le ciel ne lui a pas donné la grandeur, les talents et la puissance pour combattre un peuple chrétien. Il le dissuade de poursuivre la conquête de la France, œuvre injuste et impie. Il lui assure la paix, s’il quitte la France. Pour assurer la valeur de son dire, et affirmer son autorité divine, il raconte au roi un épisode caché de sa jeunesse, de sorte que le souverain est ébranlé ; il hésite entre se rendre aux paroles du moine et perdre toutes ses conquêtes, et traiter le personnage de charlatan en le renvoyant à son ermitage. Henri V, embarrassé, " balance entre la crainte et la résistance ". Finalement il refuse d’accorder la paix, et sans répondre, le roi congédie son mystérieux interlocuteur.

Jean répond que la mort serait la punition de cet entêtement, et il disparaît.

Le 11 mai 1422, Henri V lève le siège de Meaux. Il se trouve à Vincennes dans le courant d’août lorsque la maladie le prend et il se sent bientôt à toute extrémité. Dans son angoisse, il fait chercher l’ermite dont on avait perdu la trace. Celui-ci reparaît de lui-même. Amené devant le roi d’Angleterre, celui-ci lui demande s’il échappera à la mort. Le solitaire lui répond : " Vous êtes à votre fin, avisez votre âme ". Le roi répond : " Or donc savez-vous s’il pourra plaire à Dieu qu’en mon lieu, après moi, mon héritier règnera sur la France ? ". A cette dernière question, le religieux certifie au roi Henri " travaillant à la mort, que nenny et jamais n’y aurait règne ni durée ", et il annonce au roi qu’il n’échappera pas à la mort. Jean repart comme il est venu, et sa prédiction se réalise : le roi meurt le 21 août 1422 et le bébé son fils est proclamé roi d’Angleterre et héritier de la couronne de France. Le duc de Bedford accourt en hâte à Troyes où il se trouve alors, et devient régent pour la France. Peu après, le 21 octobre, Charles VI meurt.

Alors, deux souverains prétendent au trône de France : le fils de Charles VI, Charles VII, à Bourges, qui sera sacré à Reims en 1429, après la chevauchée conduite par Jeanne d’Arc, et Henri VI qui sera sacré à Paris en 1431.

Dès lors, la fortune des armes sourit à Charles VII, mais il faut du temps pour que enfin la paix soit signée à Picquigny en 1475.

Après cette double visite au dauphin de France et au roi d’Angleterre, le bienheureux Jean se retire à Troyes, ville de sa naissance, et y acquiert une grande notoriété. Il demeure à l’hôtellerie des Trois Maures, rue du Dauphin (rue Turenne), et fréquente surtout l’église des Jacobins. Il y décède le 29 novembre 1439, vers midi.

" L’on vit bientôt s’élever au-dessus de l’auberge des Trois Maures, un feu qui fit accourir la foule : ce n’était pas un incendie comme on l’avait d’abord cru, mais un prodige céleste qui signifiait le feu qui avait brûlé le cœur du saint ermite. L’hôtesse eut soin de mettre de côté les patenôtres, cilices, haires et ceintures de fer de son pensionnaire, mais elle ne put résister à la demande de quelques personnes dévotes à qui elle distribua une partie de ces reliques ".

Selon la volonté du défunt, sont corps est enterré dans la nef de l’église des Jacobins, à droite du grand portail, " dans un cercueil de bois et sous une tombe de pierre ", où il y avait " l’empreinte de l’image d’un ermite ayant grande barbe, grands cheveux, les mains jointes, patenôtres pendant à icelles, et à l’entour de cette image était écrit gravé :" ci gît l’ermite qui se nommait Jean de Gand, et trépassa en cette ville de Troyes, le 29° jour du mois de septembre de l’an 1439 ".

Des miracles se produisent alors sur la tombe : " Dieu fit pour lui décédé, plusieurs beaux miracles sur tous genres de malades pour sa gloire ; et nouvellement mort qu’il était, invoqué de ceux qui avaient en Dieu ferme foi et assurance, encore qu’ils fussent grandement intéressés de maladies incurables ou longues ou difficiles à guérir, en un moment ils en étaient soulagés ou guéris ".

Le roi Louis XI vieillissant, cherche des protecteurs célestes. Ayant entendu parler de ce saint homme venu auprès de son père annoncer sa naissance, et des miracles qui s’opèrent sur sa tombe, il écrit aux frères prêcheurs de Troyes, le 13 octobre 1482, pour s’enquérir sur le saint homme. Ayant reçu ces renseignements le 9 novembre, il fait demander à l’Evêque de Troyes, de procéder à l’exhumation des restes de l’ermite. Une telle demande royale est un ordre. Dès le 13 novembre 1482, Mgr Louis Raguier assisté de nombreuses dignités ecclésiastiques et civiles de la ville, en présence des notaires, fait hisser le cercueil dans le chœur de l’église et chanter une grande messe. Devant l’affluence d’une foule qui se presse de toute part, le cercueil est porté au trésor et on l’ouvre. On sépare les ossements de la terre et de l’eau qui s’étaient infiltrées et les restes dûment lavés sont déposés dans un coffre de bois fermé à clef, et mis dans une niche dans le mur de la nef. Louis XI envoie un drap d’or à déposer sur le cercueil, puis entreprend des démarches en vue de sa canonisation par le pape Sixte IV, en lui demandant des reliques. Il y a environ 24 guérisons inexplicables.

En février 1483, le roi écrit aux Dominicaines de Troyes : "… après notre vœu, par son moyen, aide et intercession, nous sommes venus à être guéri… ", et il réclame encore quelques reliques, manifestant ainsi le crédit qu’il accorde au bien heureux.

Malheureusement, la mort de Louis XI, celle de Sixte IV… font disparaître les protagonistes du procès en canonisation, qui est abandonné.

Les saccages de la Révolution font disparaître les dernières traces de Jean de Gand, mais vous verrez sa statue à la cathédrale, dans la chapelle à gauche, face à celle de Jeanne d’Arc.  

Statue en la Cathédrale de Troyes
Jehan de Gand
Statue en la Cathédrale de Troyes
Jeanne d'Arc


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