C'est notre histoire



Jean-Baptiste Raisin dit Siret



Jean-Baptiste Raisin naît à Troyes, le 3 mai 1604.

En 1650, il est organiste de la cathédrale de Troyes, ayant succédé à son père Mille Siret. Il est aussi musicien et compositeur.

En 1651, il est aussi organiste de Saint-Pantaléon. Il compose un recueil de pièces de musique intitulé : « Prières de clavecin ». Louis Couperin, organiste de Saint-Gervais et de la chapelle du Roi, joue ses compositions.

Raisin est bon musicien, actif, intelligent, mais malgré ses talents et ses travaux, le pauvre homme a grand peine à élever sa nombreuse famille. N’ayant pas dans la ville de Troyes, un assez grand nombre d’élèves qui puissent le payer correctement, il se met à enseigner son art à 4 de ses enfants. En peu de temps, Raisin a une petite compagnie de 4 musiciens d’une force qui eut été remarquable chez des hommes, mais qui est étonnante et merveilleuse chez des enfants. L’aîné a 8 ans, le cadet 7, Babet leur sœur 6 et le plus jeune, qui s’appelle Jean-Baptiste comme son père, 4 ans.

Raisin comprend bientôt que l’instrument de sa fortune sera le petit Jean-Baptiste, qui est excessivement petit pour son âge.

L’organiste troyen imagine donc une épinette à 3 claviers « longue de 3 pieds et large de 23 et demi, avec un corps dont la capacité est le double plus grande que celle des épinettes ordinaires ». Quand son idée est perfectionnée, Raisin quitte son orgue et vient à Paris avec sa femme, ses 4 enfants et l’épinette.

Il y a alors à Paris, chaque année, deux foires célèbres, la foire Saint-Laurent et la foire Saint-Germain. Le père Raisin arrive à l’époque où se tient cette dernière, loue une loge et y installe un petit théâtre sur lequel il paraît lui et sa famille. Il annonce que les personnes qui lui feraient l’honneur de se rendre à son spectacle y entendraient un clavecin merveilleux qui joue tout seul les airs qu’il conviendrait à la société de commander. Il prétend n’avoir besoin que de prononcer à l’instrument certaines paroles.

Dès la première journée, une affluence considérable se rend au spectacle tout nouveau, et chose merveilleuse, ce que Raisin a promis se trouve vérifié de point en point. Trois clavecins sont disposés sur le théâtre : l’un est tenu par Raisin le père, l’autre par Babet et son frère aîné, et le troisième par personne. D’abord le père et ses enfants jouent un concerto, puis ils lèvent les bras en l’air, et le troisième clavecin, auprès duquel on ne voit personne, se met à répéter le concert précédemment joué, mais avec des variations délicieuses. Puis, on prie une ou plusieurs de la société de commander à son gré au clavecin. Celui-ci joue, selon les ordres qu’il reçoit, rapidement ou lentement, des airs gais ou tristes, des chants de victoire ou des lamentations, et ne s’arrête qu’à la parole. Tous ceux qui viennent à ce spectacle, s’en retournent émerveillés, ne comprenant rien à un semblable instrument, qui possède l’intelligence d’un être animé et le talent d’un musicien habile. Chaque jour, le petit théâtre du père Raisin est encombré par la foule qui excite si vivement l’admiration du peuple, que le jeune roi Louis XIV veut voir aussi cette merveille, et que la famille Raisin est mandée au château royal de Saint-Germain, où se tient alors la cour.

Raisin a, depuis un mois qu’il a débarqué à Paris, gagné beaucoup d’argent, beaucoup de gloire. Il va mettre le comble à sa réputation. Le grand jour arrive. Il se rend donc aux ordres du roi. Il y a comédie ce soir-là au château, la cour tout entière, cette resplendissante cour de Louis XIV, est présente. Le père raisin, sa famille, son épinette merveilleuse, jouent selon la coutume, leurs rôles respectifs à la satisfaction générale, l’épinette surtout jette tout le monde dans l’admiration. Chacun dit son mot pour expliquer cet inexplicable mécanisme. Quelqu’un parle de sorcellerie. Il n’en faut pas davantage pour effrayer la reine-mère Anne d’Autriche. En effet, c’est encore un peu le temps où l’on croit aux sorciers. La reine fait approcher le père Raisin, lui demande son secret. Celui-ci hésite et balbutie. Ses refus excitent de plus en plus la crainte curieuse de la reine qui tremble et pâlit. Le jeune roi Louis XIV s’approche alors et met fin à ce débat en ordonnant l’ouverture de l’épinette. Raisin supplie, demande grâce, et dit n’avoir pas la clef. Mais Louis XIV est peu habitué à trouver de l‘opposition à sa volonté. Il ordonne que l’on enfonce à l’instant la machine. Le pauvre Raisin, poussé dans ses derniers retranchements, tremblant, effrayé, se hâte de l’ouvrir. Quel est alors l’étonnement de la cour en voyant sortir de cet instrument le pauvre petit Jean-Baptiste Raisin, tout éperdu, à moitié mort de peur et presque étouffé ! On s’empresse auprès de cette intéressante créature, la reine elle-même le prend sur ses genoux, lui fait respirer des sels, le rassure et le caresse. Parfaitement revenu à lui, le jeune artiste se met à un clavecin ordinaire et visible à tous, et recommence à jouer les airs charmants qu’il a déjà exécutés du fond de sa prison harmonieuse. Son succès est complet, tous les courtisans lui font leur cadeau, et il s’en retourne chargé d’or, comblé de caresses et de félicitations.

Le succès du père Raisin est encore plus grand lorsqu’il annonce son triomphe obtenu devant le roi Louis XIV. De retour à sa loge de la foire de Saint-Germain, chaque jour, il voit sa salle comble et sa caisse pleine.

La foire finie, Raisin voyant avec quelle facilité ses enfants apprennent tout ce qu’on leur enseigne, crée une troupe de petits comédiens. Il fait composer une farce, dans laquelle, chaque jour, le petit Raisin joue le principal rôle qui lui attirent chaque jour, de nombreux applaudissements. La pièce a pour titre, l’Andouillette de Troyes. Le petit Jean-Baptiste est recouvert tout entier d’un taffetas gris, on le ficelle comme une véritable andouillette, et on le sert au milieu d’une table bien garnie d’autres plats. D’abord, les acteurs mangent des autres mets, ensuite ils attaquent l’andouillette en coupant plusieurs tranches, puis l’un d’eux, plus gourmand que les autres, propose de couper l’andouillette en deux et d’en manger la moitié à lui seul. Le pari accepté, on procède avec un grand coutelas à l’autopsie de cette immense pièce. L’andouillette pousse un cri perçant, saute en l’air, se roule sur la table, renverse plats et bouteilles, déchire son enveloppe : on voit apparaître un petit cochon de lait, qui mange le dessert préparé pour les convives, et les mord aux jambes. Les acteurs se sauvent, courent, crient, mais un, des plus courageux se retourne, et propose de mettre à la broche, l’animal révolté. Il se met à la poursuite du petit cochon, mais au moment de le percer, une nouvelle métamorphose s’opère : l’animal se transforme en petit diable noir, laid, hérissé, furieux, qui, saisissant la broche pointue, poursuit les agresseurs qui se sauvent en poussant des cris, et finissent par demander pardon. Un jour, l’acteur chargé de combattre le petit cochon de lait, prend une broche dont la pointe est très fine, et le pique par mégarde. Jean-Baptiste, dans sa peau de cochon, s’irrite et fond sur son adversaire. La peur trouble sans doute la raison de l’agresseur, qui frappe de sa broche à tort et à travers. Le pauvre petit Raisin tombe percé de plusieurs coups et est mortellement blessé. Les secours ne peuvent le sauver, et il meurt quelques jours après, alors âgé de 6 ans. Sa petite sœur Babet en ressent une telle douleur qu’elle perd la raison.

Raisin meurt peu après son fils. Sa femme continue avec sa troupe qui prend le titre pompeux de « Comédiens de Monsieur le Dauphin ». De Paris, elle se rend à Rouen, où elle dépense follement ce qu’elle possède avec Olivier, gentilhomme de M. le prince de Monaco, qu’elle aime, et qui la suit partout. Forcée par la misère elle regagne la capitale en 1666. Le grand Molière lui prête son théâtre pour quelques représentations. La foule accourt avec tant d’empressement, que les recettes s’élèvent à plus de mille écus.

Mais, bientôt, la troupe du Dauphin se disperse et ne reparaît plus.

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