La vie à Troyes



Le pain


" Donne-nous aujourd’hui notre pain quotidien ", récitent les chrétiens dans le "notre père".

Il faut savoir que le manque de pain a provoqué à Troyes de multiples révoltes.

Le pain est la base de l’alimentation du peuple, si bien qu’en cas de mauvaise récolte en céréales, la pénurie provoque des émeutes frumentaires (on dit à l’époque " émotions populaires ").

Cette précarité est accrue par l’existence d’une population ouvrière vivant au jour le jour. Il faut peu de chose, en certaines circonstances pour que le peuple s’échauffe, se déborde et se livre à des voies de fait soit sur les boulangers, soit sur les meuniers, soit sur les marchands de grains.

En 1530, les pauvres gens qui dérobent le blé dans les sacs des laboureurs, sont battus de verges sur place du marché au blé.

En 1586, séditions populaires, en raison du prix élevé des grains. De nombreuses arrestations ont lieu, et pour inspirer une certaine terreur, 3 potences sont dressées, l’une devant le palais, une autre à l’Etape au Vin, la troisième au Marché au Blé.

En 1625, la ville manque de pain, le peuple se soulève à 3 reprises. 13 malheureux sont pendus dans la même journée.

Le 16 avril 1626, le blé, le pain, la faim sont la cause d’émotions populaires d’une très grande gravité. La foule, armée de bâtons, crie devant la maison du maire " qu’elle n’a ni pain, ni blé, ni farine, que depuis 3 jours ils meurent de faim et demandent du pain ou du blé, qu’ils veulent vivre ou mourir… Cette turbe insolente et indiscrète jette des pierres à ceux qui conseillent à ces gens affamés de rentrer à leur domicile… ". Elle pille les maisons qui renferment du blé. Le lendemain, 13 pendus se balancent aux gibets du Marché au Blé, et il y a de nombreux prisonniers.

En 1629, les Troyens sont réduits à apaiser leur faim avec du pain de chènevis.

L’agriculture de la Champagne, par la nature du sol si peu fertile, ne produit pas sous Louis XIV, de quoi faire vivre sa population. C’est pourquoi les disettes et les famines sont fréquentes et cause d’émotions et de révoltes populaires.

En mai 1643, Troyes ne renferme pas la moitié de grains nécessaires, pour attendre la prochaine récolte.

En mai et juin 1649, la population s’émeut à l’occasion de la future mauvaise récolte.

En 1652, " la population se porte au-devant de la maison du maire pour demander du grain ".

En 1693, lors d’une distribution de vivres par la municipalité, une foule d’affamés y court, 5 femmes sont étouffées. En avril suivant, la faim est si grande que la populace pille le marché au pain et les boutiques de boulangers. L’autorité fait garder les portes, afin d’empêcher les étrangers de venir acheter du blé au marché.

En 1699, de nouvelles émeutes ont lieu, pour la même cause. Le peuple se contente de pain d’avoine ou de sarrasin, lorsqu‘il manque de seigle.

L’année la plus terrible est en 1709, une gelée rigoureuse ayant détruit les jeunes blés. La misère est horrible, aussi bien à la campagne qu’à la ville. Une déclaration du roi oblige tout individu à faire connaître la quantité de grain qu’il possède, à peine de 300 livres d’amende et, en cas de fausse déclaration, outre l’amende et la confiscation, il y a condamnation aux galères et même peine de mort !!

La mortalité est alors considérable. Du 1er au 22 novembre, il décède 69 pauvres à l’Hôtel-Dieu, et en janvier et février suivant, 400, soit plus de 2.000 en 1710.

En 1740 et 1741, le peuple s’ameute. 700 ouvriers demandent du pain " et se portent chez le bailli. Plusieurs maisons sont envahies, des vols commis, des citoyens violentés, des tentatives d’incendie…". Cette disette est cause de la ruine d’un grand nombre de familles et d’un appauvrissement général.

Le 18 juin 1770, le peuple de Troyes, excité par les meuniers et les boulangers, accable d’injures le sieur Buquet du moulin de Jaillard, menace de l’assassiner à coups de pierres, et de brûler son moulin… " il en vient même jusqu’à des placards et billets anonymes distribués contre lui ". Le 19, vers les neuf heures du soir, " sur la voiture qu’il fait conduire d’Arcis à Troyes, près de Saint-Nizier, une populace séditieuse de plus de 500 personnes, qui parlaient avec chaleur, lui enlève un sac de blé et perce les autres de plusieurs coups de couteaux… A la suite de cette émotion populaire, le lieutenant de police arrête un particulier qu’il est obligé d’élargir faute de preuves, parce que ce fait s’étant passé la nuit, il n’a pas été possible de distinguer ceux qui y avaient donné lieu… ".

L’hiver 1788-1789, 7.000 ouvriers troyens chôment et sont sans pain. Ils assiègent l’Hôtel de Ville, où le blé est entreposé. Un émeutier est banni à perpétuité et un autre emprisonné. C’est le 9 septembre 1789, pendant des jours d’émeute, que la population affamée, massacre l’honorable maire de Troyes Claude Huez.

En 1793, chez les boulangers, on se dispute les pains. La garde appelée par la municipalité, est forcée de les faire couper pour contenter la foule.

Au marché du 7 août, 600 femmes se retirent sans avoir pu acheter du pain.

En 1795, Troyes manque de pain pendant plusieurs jours"On en donne une demi-livre, puis quatre onces, puis point... ". Il y a des rassemblements préludes d’émeutes.

Lors de l’occupation de 1814 Troyes a faim. Le 7 mars l’ennemi demande 200.000 rations de pain à rassembler en 24 heures sous peine " d’exécution militaire ". Tous les habitants portent du pain dont ils se sont privé. Mais, quelle indignation quand l’on apprend que les fourgons de l’ennemi regorgent de pain, et que le 12 mars, oh horreur les ennemis jettent dans la Seine une immense quantité de pains, farines et grains ! Le 2 avril, les cosaques exigent 40.000 rations de pain, à livrer dans les 2 heures, sinon, ils pilleront la ville et tueront le maire et les adjoints.

Le conseil municipal du 23 mars 1918 interpelle le ministre du ravitaillement sur la mauvaise qualité du pain, composé de farine d’orge, gris, mal levé, immangeable et malsain ! 

Un décret du Président de la République du 10 mars 1920, demande à toutes les communes, de distribuer des bons de pain hebdomadaires, au prix de 0, 15 F les 400 grammes, pour les chefs de famille de 3 enfants de moins de 17 ans, les femmes en charge de 2 enfants de moins de 17 ans, les militaires pensionnés à au moins 50%, les ouvriers accidentés du travail à 50 %, les personnes nécessiteuses, les personnes hospitalisées, les vieillards, infirmes, aveugles, incurables, les femmes en gestation après le 5° mois, les femmes allaitant au sein, les enfants de moins de 13 ans, orphelins et recueillis des centres publics ou privés. Ceux qui trafiqueraient des bons de pain auraient 2.000 F d'amende et 6 mois de prison.   

Aujourd’hui, toutes sortes de pains sont faits, à consommer, sans complexe.

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