Religion



Les derniers abbés de Montier-la-Celle


C’est avec un grand plaisir que je dédie ce chapitre à Madame Nadia Rose, directrice de la Polyclinique de Montier-la-Celle, qui, en 10  minutes a compris combien le terrain sur lequel a été bâti son entreprise était prestigieux, celui de l’emplacement d’une abbaye qui fut, du VII° au XII° siècle une des plus illustres de Champagne, du Royaume de France et de l’occident chrétien. Pour un devoir de mémoire et de culture, en quelques jours, Madame Rose a mis dans les chambres de ses patients un livret retraçant toute l’histoire de cette abbaye. M’ayant demandé des renseignements complémentaires (que je n’ai pas encore pu fournir), j’ai trouvé ces notes pour un nouveau chapitre. Merci Madame, vous qui venez du sud, vous avez battu les autochtones aubois.

 

En 1904 la Société Académique de l’Aube acquiert une peinture sur bois, malheureusement très endommagée parce qu’elle est faite sur un volet qui a longtemps servi de porte à un poulailler, mais doublement précieuse par son origine et par le sujet qu’elle représente. Provenant de l’église de la célèbre abbaye de Montier-la-Celle, elle représente Charles de Refuge qui fut abbé de ce monastère de 1488 à 1514. Le tableau se trouvait dans l’église au milieu du XVIII° siècle. Le prie-Dieu devant lequel l’abbé est à genoux soutien sa crosse d’or et on voit sur le bas ses armoiries.

 

         Charles de Refuge ne fit pas seulement reconstruire le cloître, il fit bâtir un dortoir, la salle du chapitre et 2 sacristies et il fut reconnu comme le véritable fondateur.  

 

         Aux deux abbés réguliers élus par leurs pairs, et qui peuvent être regardés comme les fondateurs de l’église, succédèrent des abbés commendataires nommés par le roi, en vertu du concordat de 1516.

 

L’abbé Antoine Gérard, élu en 1517, continua l’œuvre de son prédécesseur Charles de Refuge.

 

Ces abbés furent pour la plupart des prélats ou des personnages bien en cours, qui touchaient les deux tiers des revenus du monastère, sans en avoir les charges. Tel fut le futur cardinal de Lorraine, Charles, fils du duc de Guise, qui, à peine âgé de 10 ans, succéda à Antoine Gérard et devint archevêque de Reims.

 

Lorsqu’il fut investi de cette dignité, en 1538, il céda son abbaye à François de Dinteville, évêque d’Auxerre, qui, disgracié en 1540 et remplacé par Jean de Luxembourg, évêque de Pamiers, puis par Pierre de Mareuil, évêque de Limoges (1544-1548), fut rétabli dans ses droits en 1548.

 

Dinteville revenu de son exil en Italie continua l’œuvre de ses devanciers. En 1551, il commença de garnir de vitraux peints par les verriers de Troyes, les hautes et larges fenêtres du sanctuaire.

 

Benjamin du Plessis son parent et successeur, continua de les décorer, et ses fonctions durèrent de 1554 à 1608, laissant dans le monastère de fâcheux souvenirs. Ses religieux lui reprochèrent d’avoir fait vendre des vases sacrés du reliquaire pour subvenir au paiement d’une somme de 550 livres tournois (1 l. t. vaut 240 deniers ou 20 sous, 0,862 g d’or pur) demandée par le cardinal de Lorraine au nom du roi. Ce qui causa aussi un vrai scandale, ce fut l’extrait de son testament où il faisait des avantages à son fils naturel « que j’ai fait légitimer, pour lui donner moyen de dignement vivre et se maintenir et entretenir ». Il lui laisse entre autres des meubles et acquêts d’immeubles, avec la terre de Cauffay, à condition qu’il fasse à sa mère, Louise de la Rue, une rente de 40 écus d’or, de 6 muids (1 muid correspond à 1 872 litres) de blé, de 3 muids (1 muid correspond à 274 litres) de vin et de 500 fagots.

 

         L’église était presque terminée lorsque survinrent les guerres civiles et religieuses, et les abbés qui succédèrent à Benjamin Plessis eurent plutôt à l’entretenir qu’à la compléter : Antoine de Lamet (1609-1617), Jacques Gaudart.

 

Ce dernier, fils d’un conseiller au Parlement de Paris, était lui-même conseiller clerc au même Parlement, et avait en outre les titres d’aumônier du roi et de chapelain de la Sainte Chapelle. Il participa au mouvement de rénovation de la discipline religieuse, en introduisant dans son abbaye 4 religieux de la congrégation bénédictine de Saint-Vanne. Ils y établirent la réforme. Ils y créèrent un collège pour la philosophie et la théologie.

 

Jacques Gaudart séjournait à Paris et dans son monastère. Mais, il habitait principalement dans la maison abbatiale que les religieux avaient achetée à Troyes, en 1433, pour y établir un hospice et un refuge en temps de guerre. Située dans la rue du Flacon (rue Boucherat), elle fut connue sous le nom de « Petit-Montier-la-Celle » pour la distinguer des « Grandes Maisons de Montier-la-Celle », que le monastère possédait rue de l’Epicerie (rue Emile Zola), et où il mourut le 29 octobre 1661.

 

Il résigna en 1660 son bénéfice en faveur de son neveu, Charles de Brion, tout en conservant la jouissance du « Petit-Montier-la-Celle ». Il est remplacé par un autre neveu de Jacques, Pierre Gaudart (décédé en 1684), en 1661. Comme son oncle, il avait un domicile à Paris.

 

Les abbés ont à leur charge, outre la métairie de la Courtellerie et l’entretien du chœur de l’église de Saint-André, dont ils étaient « gros décimateur », les 2 maisons abbatiales du monastère et de la ville qui  étaient en très mauvais état en 1684. Les murs de celle du monastère et du pavillon adjacent avaient besoin de réparations.

 

Aussi, le successeur de Gaudart, René de Mornay, fils du marquis de Montchevreuil, nommé par le roi à l’âge de 17 ans, et qui demeurait à Paris, fit un traité avec les religieux pour construire, au midi de leur église, un nouvel hôtel abbatial, l’ancien ayant ses bâtiments détruits.

 

Son successeur Antoine de Bérard de Montalet de Villebreuil, le remplaça en 1700, mais ne prit possession de l’abbaye qu’en 1714, et fit de nombreux travaux et réparations. L’abbé avait conservé des prérogatives importantes, il avait sous sa juridiction 17 prieurés et nommait 31 cures.

 

L’abbaye fut réunie à l’évêché de Troyes, en 1770, du consentement de Villebreuil, avancé en âge et sans aucune protestation.

 

Une bulle de Clément XIV consacre cette réunion faite sur la demande du roi, qui eut désormais la nomination à tous les prieurés qui dépendaient de l’abbaye.

 

Les religieux étaient au nombre de 10, lorsque la Révolution éclata.

 

Les scellés furent posés par les soins de la municipalité de Saint-André le 10 mai 1791. Le mobilier de l’église et du couvent fut vendu aux enchères le 13 avril 1792.

 

Quand l’église et le couvent eurent été dépouillés, ils furent mis en vente, avec leurs dépendances, basse-cour (désigne la partie entre la première enceinte et la seconde) où étaient les écuries, grange, greniers et remises, avec leur jardin et 2 vergers. L’adjudication fut prononcée au prix de 52.300 l. au profit de Louis-Dheurles-Lebrun.

 

Cela entraîna à bref délai la démolition de l’église.


Sur le bandeau du  bas de chaque page, vous cliquez sur "Plan du site", qui est la table des matières, et vous choisissez le chapitre qui vous intéresse. 

Cliquez sur "Nouveaux chapitres"  vous accédez aux dernières pages mises en ligne.


Rechercher sur le site :