C'est notre histoire



Charles Maurras à Troyes


Condamné à la réclusion à vie, le vieux leader royaliste, sortant de Clairvaux, après 2749 jours de détention, donne sa première interview à Troyes, aux journalistes.

 

Charles-Marie-Photius Maurras, nait le 20 avril 1868 à Martigues.

 

C’est un journaliste, homme politique et poète français , membre de l'Académie française.

 

         En septembre 1898, l'antisémitisme de Maurras le range dans le camp des antidreyfusards. Il s'oppose ainsi à la demande de révision du procès du capitaine Alfred Dreyfus, alors relancée à la suite des aveux et du suicide d'Hubert Henry, officier qui avait fabriqué plusieurs faux pour faire croire à la culpabilité du capitaine. Maurras rédige l'éloge d'Henry.

 

         En novembre 1899, Maurras rejoint la Revue d'Action Française. Sa stratégie et son ambition prennent corps : convertir au royalisme tous les nationalistes français.

 

         En 1905, Charles Maurras fonde la Ligue d'Action Française.

 

         Dès 1940, il soutient le régime de Vichy et le maréchal Pétain, s'enthousiasmant pour la fin de la démocratie et de la République ainsi que pour l'instauration d'une législation antisémite et la création de la Milice. Il poursuit la publication de « L'Action Française » sous l'occupation allemande, avec l'accord de l'occupant.

 

         Maurras se proclame « antigaulliste » et qualifie les résistants de « terroristes » et « révolutionnaires », appelant à la répression la plus violente contre eux : il exige « des otages et des exécutions », il recommande « la mise à mort des gaullistes faits prisonniers », sans autre forme de procès, il déclare que si « la peine de mort n'était pas suffisante pour mettre un terme aux activités des gaullistes, il fallait se saisir des membres de leur famille comme otages et exécuter ceux-ci ».

 

         Maurras écrit en 1944 que « si les Anglo-Américains devaient gagner, cela signifierait le retour des francs-maçons, des Juifs et de tout le personnel politique éliminé en 1940 », et que soutenir les Alliés serait prendre parti « du mauvais côté ».

 

         Arrêté le 9 septembre 1944, à la Libération de la France, ses articles lui valent d'être condamné pour intelligence avec l'ennemi et haute trahison, à la réclusion criminelle à perpétuité et à la dégradation nationale, le 28 janvier 1945, par la cour de justice de Lyon. De cette dernière condamnation découle son exclusion automatique de l'Académie française.

 

         Charles Maurras passe une grande partie de ses 2749 jours de détention à la prison de Clairvaux.

 

         En 1952, sa santé déclinante le fait admettre à la clinique Gorecki, rue Charles Delaunay à Troyes, en attendant d’être conduit à Tours, à la clinique privée de Saint-Symphorien-lès-Tours, où il a été assigné en résidence.

 

         C’est aux journalistes, dont Jacques Margaine de l’Et-Eclair, qu’il accorde sa première interview depuis sa semi-libération.

 

         Le 19 mars à 11 h, le gardien de la paix en civil qui montait depuis plusieurs semaines une faction vigilante dans le hall d’entrée de la clinique Gorecki, quitte définitivement les lieux. Quelques jours auparavant M. Savinaud, substitut du Procureur de la République, alerté par un télégramme de la chancellerie, avait, en présence du Directeur de la Maison Centrale de Clairvaux, informé Charles Maurras de la mesure prise à son égard par le Garde des Sceaux, à la suite de laborieuses délibérations du Conseil Supérieur de la Magistrature. La levée d’écrou ayant été signée, il ne s’agissait que d’une commutation de peine et non d’une grâce.

 

         Pour la première fois depuis 7 ans, les journalistes (dont « l’Est-Eclair ») étaient admis à voir l’ancien directeur de « L’Action Française » et à lui parler. Il les reçut dans la chambre n° 6 du 1er étage, où il était depuis le 9 février. Maurras dit avec un large sourire combien il était heureux de recevoir des confrères. A 84 ans, il avait toujours son étonnante verdeur intellectuelle, mais il souffrait dans son être physique en raison de sa longue détention, malgré les soins attentifs qui lui ont été prodigués à la clinique Gorecki par le docteur Blouët. Il avait d’ailleurs complètement perdu l’usage de l’ouïe, et n’avait plus qu’une seule dent.

 

         Il entretint longuement les journalistes de son procès. Il souhaitait la révision de son procès : « c’est ce qui compte pour moi. Je suis tranquille et je peux mourir. Je sais que les miens sauront me défendre et que la vérité finira par voir le jour ». Il parle de son activité pendant sa détention, il n’a jamais cessé d’écrire.    

 

         L’entretien avec les journalistes dure 1 heure, puis il leur serre la main, disant : « Le journalisme, c’est le plus beau métier. On dit ce que l’on pense. On éclaire l’opinion ».

 

            Il remercie M. et Mme Gorecki, puis son médecin le docteur Blouët qui, pendant de longs mois le soigna avec beaucoup de dévouement.

 

         Les photographes de presse, accourus de Paris la veille, objectifs et flashes prêts à déclencher s’affairent, il ne fallait pas « rater la sortie » de Maurras, faisant ses premiers pas d’homme « presque » libre.

 

         Il y a là des membres de sa famille, son défenseur Me Calzant, et des amis dont certains portent à la boutonnière une discrète fleur de lys.

 

         Sortant de sa chambre n° 6, il dit : « Je vais enfin pouvoir revoir le monde. C’est cela qui m’était pesant : plus de contact avec le monde. Mes livres et ma plume m’ont aidé à supporter la longue solitude. Oui, c’est exact, j’ai terminé un livre sur Pie X, ce fut un grand homme. Je vais pouvoir travailler à la révision de mon procès ».

 

         Apprenant qu’il allait partir pour Tours, il avait demandé à sa famille, le matin même, d’aller à Clairvaux chercher tous les livres qu’il y avait laissés.

 

         Cette fois, c’est le départ, le commissaire Blanc, l’inspecteur chef Tournemeule, et l’inspecteur sous-chef Bourotte montent dans la traction qui va convoyer Charles Maurras et sa suite jusqu’à Tours, par Sens, Montargis, Orléans où il y aura un arrêt pour déjeuner, et Blois.

 

         Il est 9 h 20 lorsque la voiture passe la grille, précédée de la voiture de police et suivie de 4 autres véhicules où se sont entassés parents, amis et journalistes.

 

         Puis le détenu 8321, Charles Maurras quitte Troyes pour Tours où son séjour sera très court puisqu’il s’éteint le 16 novembre 1952, à la clinique privée de Saint-Symphorien-lès-Tours.

 


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