Pendant les Guerres



Cherté de la vie en 1914


Guerre 1914 à Troyes : je pense qu’il est très intéressant et instructif de vous donner à lire une partie du rapport sur « La cherté de la vie à Troyes », de la Chambre de Commerce de Troyes, en date du 7 janvier 1916, adressé à M. le Ministre du Commerce et de l’Industrie, à M. le Ministre des Finances, à M. le Ministre du Travail et de la Prévoyance sociale, à MM. Les Sénateurs et Députés de l’Aube.

 

         «  Les projets et questions qui intéressent les problèmes de la vie chère ont déjà fait l’objet de nombreuses discussions, mais, il faut le reconnaître, aucune n’a donné de résultat appréciable. Depuis le début des hostilités, la situation s’aggrave de jour en jour et les conditions de vente de tous les produits les plus nécessaires à la vie, d’élevées qu’elles étaient, deviennent excessives.

 

Les causes en sont multiples, mais elles peuvent cependant se classer en 2 catégories principales :

 

1) le manque de bras qui a pour conséquence la diminution dans la production,

 

2) les difficultés que l’on rencontre tant pour les importations que pour les transports à l’intérieur. Pour résister à ses ennemis héréditaires qui voulaient son anéantissement, la France a dû mobiliser plus de 4 millions d’individus qui, pour leur envoi au front, ont dû être choisis parmi les plus habiles et les plus vigoureux. Il en résulte une non production importante qui se trouve accentuée par la perte de 9 de nos départements envahis, dont le concours à la fortune de France ressortait à environ 25 %. Le défaut de main-d’œuvre, dans la partie de notre territoire qui reste exploitée, est aussi une cause de renchérissement d’autant plus que les ressources locales ne se trouvent plus proportionnées, depuis la mobilisation, d’importantes unités militaires et d’un grand nombre de réfugiés. A cela, aucun remède, puisque les bras si nécessaires à la production sont employés à la défense de notre sol

 

De graves inconvénients résultent de la désorganisation des services qui fonctionnaient avant la guerre entre les campagnes et les villes, centres de grandes consommations, et qui ont dû cesser depuis les réquisitions qui ont été faites des attelages et du matériel des transporteurs. Il s’ensuit que la voie ferrée peut seule être utilisée pour les échanges qui sont nécessaires entre les diverses localités d’un même département.

 

La crise du prix se fait d’autant plus sentir dans l’Aube que les importations nous sont rendues très difficiles par les conditions spéciales de l’exploitation de guerre. La gare de Troyes est régulatrice, il s’y fait un trafic énorme pour l’Armée, et cependant son aménagement pourrait en permettre l’utilisation plus régulière pour les besoins de la population civile… La pénurie du matériel, la désorganisation des transports civils et la nationalisation des chemins de fer pour le service de l’Armée, sont cause, par périodes fréquentes, et pendant plusieurs jours consécutifs, de suspension de trafic… Si l’on veut mettre fin à la crise, ou tout au moins l’atténuer, si l’on veut satisfaire aux besoins de la population civile et aux nécessités de l’industrie, le remède est dans l’augmentation du matériel et dans sa meilleure utilisation… La crise des transports, si l’on y remédie promptement, peut avoir pour cause la fermeture de nombreuses usines et maisons de commerce. Tout retard peut aggraver la situation et avoir au point de vue économique les répercussions les plus funestes.

 

Ne serait-il pas également logique de suspendre les droits de douane et d’octroi sur les produits dont nous manquons ou que nous n’avons pas en quantité suffisante, jusqu’au moment où notre marché serait suffisamment approvisionné. On obtiendrait ainsi de meilleurs prix de revient, ce qui faciliterait l’institution de cours plus abordables. On éviterait en outre que certains producteurs ou intermédiaires conservent leurs produits en attendant des cours qu’ils escomptent toujours plus favorables. La taxe, qui a de nombreux partisans, n’est pas à notre avis, une mesure suffisante pour faire diminuer les prix excessifs dont nous avons tous à nous plaindre, elle pourrait au contraire avoir pour effet de raréfier la marchandise. S’il en était ainsi, elle serait même dangereuse. La taxe ne peut être utile que s’il y a quantité et si elle doit décourager les accapareurs et empêcher toute spéculation.

 

         Sur ces considérations, la Chambre de Commerce peut émettre le vœu que le Gouvernement fasse le nécessaire pour que la population civile ne soit pas laissée aux prises avec les entraves qui résultent de l’organisation militaire, que son autorité entière soit rendue au personnel technique des Chemins de fer afin que, tout en faisant passer avant tous autres les services de l’Armée, il puisse assurer les transports des denrées alimentaires et de tous autres produits indispensables à la population civile.

 

Qu’il favorise enfin, par tous les moyens, les échanges et transactions des produits indispensables à la population civile… ».

 

                                   

Signé : Le Président : Robert Vignes

 

            Le Secrétaire : Copel-Devillard

 


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