Les Evêques influents



René de Breslay


 

En 1604, notre évêque René Benoit résigne l’évêché de Troyes, avec l’agrément du roi, à René de Breslay.

 

René de Breslay, « sorti d’une bonne maison d’Angers », est d’abord chanoine, grand-archidiacre de cette ville, ensuite abbé de Saint-Serge et de Saint-Bacchus, et conseiller et aumônier  ordinaire du roi Henri IV. Il prend possession de l’évêché de Troyes, « par procureur » le 20 septembre 1605, et le 23 octobre suivant, il fait son entrée solennelle « avec tout l’appareil usité dans ces sortes de cérémonies ».

 

Son épiscopat est agité par les tentatives plusieurs fois réitérées et toujours inutiles des Jésuites pour s’établir à Troyes. Rappelés en France en 1603, ces Pères, en même temps qu’ils s’établissent dans les meilleures villes du royaume, jettent leurs vues sur Troyes, dont la situation leur parait « agréable, commode et assez grande pour 2 maisons de leur société, une professe en l’hôpital de la Trinité, et l’autre où est le collège ». Un autre motif est la succession du P. Mairat de leur société, qui « pouvait monter à 30.000 écus », et enfin l’attachement des troyens pour la religion catholique. Ils se rendent favorables au nouvel évêque, qui leur donne tous les mouvements nécessaires pour la réussite de leur entreprise. Le Prélat se rend solliciteur de cette affaire auprès du roi, à qui il fait entendre que les Troyens demandent un collège de Jésuites dans leur ville. Il obtient pour cela des lettres de Sa Majesté. L’évêque les destine à une double action : celle d’enseigner les jeunes gens et celle de prêcher une doctrine sûre en un style élevé. Mais les Troyens influents n’en veulent absolument pas. « Le principal talent de la ville de Troyes est le commerce et non l’étude des lettres », dit François Pithou. Il y a surtout la résistance irréductible du clergé et des échevins, fermement attachés aux libertés gallicanes. Les Jésuites ont beau envoyer leur plus célèbre prédicateur, le père Binet, leurs partisans ont beau faire pression auprès du Roi, instituer des dons et des legs en leur faveur, rien n’y fait. Ses sermons produisent un effet tout contraire, les plus indifférents même, en sont offensés et conçoivent de l’indignation contre toute la société. Les esprits commencent à s’échauffer, et quelques uns vont même jusqu’à dire qu’il faut en venir aux mains pour établir ces Pères. Le Père Coton se rend à Troyes, prêche à la cathédrale et à Sainte-Madeleine. Sa présence excite tellement l’audace des partisans, que plusieurs se disposent à  prendre les armes. A la vue de ce péril imminent, les plus qualifiés d’entre les citoyens, unis aux maire et échevins, ont recours à M. de Praslin, qui vient remettre le calme dans toute la ville, avec beaucoup de sagesse et de prudence. L’évêque de Troyes est député de son clergé pour assister aux Etats Généraux de 1614. En 1618, il change dans le diocèse, l’usage de donner, pour les baptêmes, 2 parrains et 1 marraine aux garçons, et 2 marraines et 1 parrain aux filles. En 1621, M. de Breslay travaille à une réforme du clergé. Cette même année, François Pithou lègue sa fortune, sa maison et sa magnifique bibliothèque à la ville pour qu’elle établisse un collège, à une seule condition : « que les Jésuites n’y soient aucunement reçus ». La ville n’hésite plus, et le roi sollicité par une députation de la ville décide lui-même : « Je ne veux pas qu’il y ait collège ni maison des pères Jésuites en ma ville de Troyes ». En 1630, M. de Breslay organise des conférences ecclésiastiques, les curés vivent en commun avec leurs vicaires, les archidiacres, chanoines et autres font une association qui est confirmée par le pape Urbain VIII, en 1636.

 

Soit que M. de Breslay veut se décharger du fardeau de l’épiscopat, soit qu’il soit dégoûté de la ville de Troyes par le mauvais succès de ses entreprises en faveur des Jésuites, il pense à quitter son évêché. M. Jacques Vignier, fils de Jacques Vignier, conseiller d’état, n’ayant encore que 20 ans, est nommé par le roi pour le remplacer. Dès que M. l’abbé Vignier se voit destiné pour l’évêché de Troyes, il part pour Rome afin d’obtenir lui-même ses bulles. Pendant ce voyage, la Sorbonne le déclare docteur en théologie, ce qui n‘a jamais été accordé à aucun absent, ni à personne aussi jeune que lui. La faculté a égard à ses talents extraordinaires : il avait soutenu, en 4 actes publics, tous les mystères de la théologie avec une érudition merveilleuse et au-dessus de son âge. Mais il décède à Rome le 28 mars 1622, âgé de 22 ans, et y est inhumé dans l’église Saint-Louis. A la nouvelle de sa mort, le chapitre de Troyes consulte pour savoir si le siège épiscopal est vacant. Mais M. Vignier n’ayant pas été préconisé, M. de Breslay demeure encore longtemps possesseur de son évêché. L’essentiel pour lui, est de donner un enseignement solide aux jeunes. Il fait appel aux Pères de l’Oratoire. En 1630, le Collège ouvre 5 classes dans la maison de François Pithou, à l’emplacement du marché couvert actuel. Tout de suite, la maison est prospère, l’éducation est excellente et variée, avec exercices littéraires, conférences et pièces de théâtre. Pour les filles, 2 congrégations s’occupent d’elles : les Ursulines en 1629, qui enseignent la lecture et l’écriture gratuitement. L’autre congrégation est celle de Notre-Dame, en 1628,  qui s’installe dans le vieux collège de la Licorne, rue Gambey. Elles se consacrent à l’enseignement gratuit et au soin des pauvres. Marguerite Bourgeoys (voir ce chapitre), fut une de leurs premières élèves. L’évêque se charge aussi de la formation du clergé : il faut lire les registres capitulaires pour voir les réprimandes et les procès sur la tenue des clercs : habits mondains, cheveux trop longs, fréquentations suspectes, ivrognerie, jurons… Vincent de Paul lui fournit l’argent nécessaire pour la création d’une maison de Lazaristes, en 1637.

 

         Quant aux couvents d’hommes et de femmes, les Capucins s’installent en 1610. Leur prédication et un miracle les rendent très populaires. Ils se dévouent au service des Troyens, lors d’une épidémie de peste en 1626. Les Carmélites arrivent en 1620. René de Breslay veut réformer un couvent de Filles Pénitentes. Cette fois, la ville proteste : « il y a déjà 8 couvents de religieuses, dont la moitié fondée depuis 8 ans ». Le roi passe outre, et les Visitandines s’installent chez les Filles pénitentes en 1631. En 1620, les Oratoriens prennent l’administration de l’hôpital du Saint-Esprit.

 

En 1638, le Père Bompain, Jésuite, rencontre un échevin rue de la Madeleine, insistant pour l’arrivée des Jésuites à Troyes. L’échevin lui répond d’entrer avec lui dans l’église, pour demander les lumières du Saint-Esprit. Après la prière, l’échevin dit au Jésuite, en lui montrant le crucifix : « Voilà, mon Père, votre réponse. Ne voyez-vous pas ces 4 lettres qui forment l’inscription du crucifix ? Elles signifient : Jésuite n’aura rien ici ! ».

 

Mgr de Breslay décède le 2 novembre 1641, et est inhumé à la cathédrale, dans la chapelle du Sauveur.

 

« On a apprécié en lui, une générosité admirable envers les pauvres. Ainsi, on pense qu’il distribua plus de 150.000 livres aux hôpitaux ».  

 

 

 

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