Les comtes de Champagne



Le comte de Champagne Thibaud II le Grand et le roi Louis VII


En 1141, notre comte de Champagne Thibaud II le Grand fut en guerre avec le roi de France.

 

         Louis VII le Jeune ne lui pardonnait pas de lui avoir refusé son concours dans une expédition contre Toulouse. Il lui reprochait en outre d’avoir donné asile à Pierre Le Châtre qu’il venait de chasser de l’archevêché de Bourges et d’avoir fait excommunier son cousin Raoul de Vermandois par un légat du pape.

 

         A la tête d’une puissante armée le roi envahit la Champagne et brûla Vitry. L’incendie gagna la principale église où la plupart des habitants s’étaient réfugiés. Ils y étaient au nombre de 1.300, hommes, femmes, enfants. Tous périrent dans les flammes.

 

         Du haut de la colline où il a fait dresser sa tente, le jeune roi voit brûler l’église et entend les cris des victimes.

 

         Bouleversé par cet Oradour médiéval, il reste plusieurs jours sans parler, sans prendre de nourriture, prostré sous le poids du crime sacrilège, dont il a chargé sa conscience.

 

         Dans son effroi, le comte de Champagne promit, peut-être un peu à la légère, de faire lever la sentence d’excommunication lancée contre Raoul.

 

         Il n’était pas facile de faire revenir la papauté sur sa décision, mais saint Bernard était là.

 

         Thibaud avait rencontré l’abbé Bernard de Clairvaux, qui, depuis le départ du comte Hugues n’entendait plus réserver sa parole aux seuls moines de son monastère, mais se mêlait de plus en plus aux affaires du monde.

 

         Bernard devient l’ami de Thibaud, un ami attentif à le conduire sur la voie de la sagesse et de la miséricorde. En lui retentit la voix de l’abbé de Clairvaux : « Quel aveuglement étrange, quelle fureur que de dépenser tant d’argent et de peine à faire une guerre, dont le fruit ne peut être que la mort ou le péché ! ».

 

         Mais avant tout Thibaud veut préserver les routes et les villes champenoises des misères de la guerre. Il sait qu’elles porteraient un coup fatal au mouvement commercial dont son comté est en passe de devenir l’assise.

 

         Le secours que Thibaud refuse de demander aux armes, il le trouve dans l’éloquence de Bernard de Clairvaux qui plaide sa cause auprès du Saint-Siège : « Quelle peine le comte Thibaud a-t-il commise ? Si c’est crime que d’aimer ce qui est juste, de détester ce qui est injuste, alors il est inexcusable. Si c’est crime de rendre à Dieu ce qui est à Dieu, au roi ce qui est au roi, alors on ne peut l’excuser Mais son seul crime, c’est d’avoir donné asile à l’archevêque de Bourges. C’est là le sang dont on veut tirer vengeance ».

 

         Bernard négocie ensuite avec l’abbé Suger (principal ministre de Louis VII le jeune et avant de Louis VI le Gros), sur lequel, malgré leurs conceptions différentes de l’art sacré, son influence est grande, un accord par lequel Thibaud s’engage à intervenir auprès du pape pour qu’il accorde son absolution au roi moyennant la restitution de Vitry.

 

         Mais le pape exige des garanties au sujet du siège de l’archevêché de Bourges et le conflit reprend de plus belle.

 

         C’est maintenant au roi que Bernard de Clairvaux s’adresse avec une vigueur qui témoigne de l’autorité qu’il a acquise dans le monde chrétien : « Qui donc autre que le diable peut te conseiller d’ajouter des incendies aux incendies, des meurtres aux meurtres ? Le cri des victimes, les plaintes des prisonniers, le sang des morts montent jusqu’au Père des orphelins. Agis donc comme bon te semble avec ton royaume, ta couronne et ton âme ! Mais nous, fils de l’Eglise, en voyant notre mère méprisée, nous ne nous tairons pas ».

 

         Avec la fougue et la persévérance qu’il apporte dans toutes les affaires où justice et paix sont en cause, Bernard multiplie les démarches, il se charge de tout. Par ses négociations laborieuses, il sait si bien faire entendre raison au roi et à la cour de Rome, que la paix est conclue sur des bases solides, principalement après sa rencontre avec la reine Aliénor.

 

         Etonnant tête-à-tête de la belle et du saint, qui a lieu à l’issue des cérémonies de la dédicace de l’abbatiale de Saint-Denis, le 11 juin 1144.

 

         Aliénor confie à Bernard son désespoir de n’avoir pu donner au roi, après plus de 6 années de mariage, l’enfant qu’il attend d’elle et Bernard lui promet que si elle ramène le roi sur le chemin de la paix et de la justice, la Vierge exaucera sa prière.

 

         Aliénor, l’indomptable Aliénor s’incline. Le roi autorise Pierre de la Châtre à occuper son siège de Bourges. Le pape Lucius II lève solennellement l’excommunication et l’interdit. La paix est rétablie entre notre comte Thibaud et le roi, qui lui restitue le comté de Vitry.

 

         En 1145, moins d’un an après son entrevue avec saint Bernard, Aliénor donne au roi une fille, qui reçoit en l’honneur de la Vierge, le nom de Marie. Elle sera un jour comtesse de Champagne.

 


Sur le bandeau du  bas de chaque page, vous cliquez sur "Plan du site", qui est la table des matières, et vous choisissez le chapitre qui vous intéresse. 

Cliquez sur "Nouveaux chapitres"  vous accédez aux dernières pages mises en ligne.


Rechercher sur le site :