Ordonnances, lois...



Arrêtés en l'an 1500


Les archives municipales de Troyes conservent les délibérations des échevinages de la ville, depuis l’année 1429. J’ai ouvert ces registres à la date d’avril 1500 et tourné quelques feuillets.

 

A cette époque, la misère est grande dans notre ville et la peur s’y est installée. Troyes compte près de 3.000 mendiants. Dans ce nombre, certes, figurent d’authentiques infortunes, des infirmes et d’inoffensifs vagabonds. On y trouve aussi « d’inquiétants comparses, les membres d’une redoutable organisation de bandits et de truands ».

 

Depuis plus d’un siècle, la ville traîne ce boulet infâmant, elle n’a jamais réussi à s’en libérer. Périodiquement, des rafles de police nettoient les bouges, les églises et les ruelles troyennes : « bélîtres et fainéants » sont expulsés sans ménagement hors des murs, tandis que le bourreau fouette et « essorille les récalcitrants ».

 

L’alerte passée, utilisant les portes ou les brèches de la muraille, truands et coupe-jarrets refluent clandestinement vers la ville « à la façon d’une immonde marée ».

 

Toutes les fenêtres des immeubles sont garnies d’énormes barreaux de fer, les portes massives, se doublent de pentures (pièce de quincaillerie consistant en une bande de fer clouée ou rivée transversalement sur les portes) et de verrous impressionnants. Dès que la nuit tombe, la ville se terre dans ses maisons. Elle s’y enferme et dort mal.

 

Au surplus, la situation sanitaire est tragique. Jamais les lépreux n’ont été aussi nombreux : le mal de Naples, la terrible syphilis rapportée d’Italie à la suite des guerres de Charles VIII, exerce ses ravages parmi la population et la peste rôde à nouveau sous les murs de la ville.

 

         Que faire ?

 

         La mairie prend les arrêtés suivants :

 

« Ce samedi XXV° jour d’avril, l’an mille cinq cents, a été publié par tous les carrefours de la ville de Troyes ce qui s’ensuit :

 

Pour obvier (parer à une éventualité) aux grandes maladies, dangers et inconvénients qui, au moment des grandes chaleurs se pourraient causer et advenir à l’occasion de la fréquentation que font en cette ville de Troyes, les malades de lèpre et de la maladie de Naples et aussi de plusieurs jeunes vagabonds étrangers qui, sans aveu de maître, se tiennent en cette ville :

 

Ladres (lépreux) : l’on défend, de par le Roi notre seigneur et monseigneur le bailli de Troyes, à tous ladres, tant hommes que femmes, qu’ils ne viennent, ni entrent en cette ville,  dès maintenant et jusque au premier jour d’octobre prochain, à peine de confiscation de leurs chevaux et d’amende de 5 sols.

 

Syphilitiques et pestiférés : l’on ordonne à tous malades de ladite maladie de Naples et autres personnes venant de pays où il y a danger de peste, s’ils ne sont natifs de cette ville de Troyes, ou mariés en icelle, que incontinent ils vident ladite ville, à peine d’être bannis du bailliage de Troyes, par l’exécuteur de la haute justice. Et aussi, à tous vagabonds, bélistres et bélistrières étant en cette ville n’ayant ni maîtres, charge, ou aveu de personne, que pareillement ils vident incontinent ladite ville, à peine de prison et d’amende arbitraire.

 

Police des logements : défense est faite à toute personne de la ville de ne recevoir en leurs maisons, les personnes sus dites et aux hôteliers et taverniers de ne les loger, ne leur administrer vivres, à peine de 5 sols d’amende, pour chacune fois qu’ils seront trouvés faire le contraire. L’on défend également aux maîtres, frères et sœurs des Hôtels Dieu et Hôpitaux de Troyes qu’ils ne reçoivent ni logent en leurs hôtels et hôpitaux aucune personne des sus dites, mais doivent les renvoyer hors de Troyes, à peine d’amende arbitraire et délaisse de leur temporel.

 

Hygiène des marchés : l’on défend aux bouchers, boulangers, pâtissiers, regretiers (revendeurs, détaillant des vivres et de menues marchandises), regretières, et autres vendeurs de vivres à Troyes, qu’ils ne laissent approcher, manger, ne mettre la main à leurs vivres, à peine d’amende arbitraire et de prison.

 

Hygiène des rues et des maisons : l’on ordonne et commande, à tous les habitants, incontinent et sans délais, nettoyer les rues, chacun en droit de soi, et les ordures et immondices portent aux champs, loin des portes de la ville de 2 traits d’arc. Chaque samedi, balayer et ramasser les ordures et les fassent porter comme ci-dessus, sous peine d’amende arbitraire et de prison. Ceux ayant des fumiers doivent les vider dans les 15 jours à peine de confiscation et d’amendes. Que nul ne tienne, ne nourrisse en leurs maisons, caves, celliers ni autres lieux, dans Troyes, porcs, oies et canes à peine de prison et d’amende. Il est interdit à toutes personnes de plus de 7 ans, de faire leurs besoins dans les rues de Troyes

 

Filles de joie : que toutes filles de joie ou femmes diffamées seront tenues d’avoir des chandelles allumées le soir, dans leurs lieux… Que toutes femmes dissolues et de mauvaise vie, se retirent des bordels publiques, et défense aux hôteliers, taverniers, et autres personnes de ne les recevoir, loger, ni administrer vivres en leurs maisons, avec hommes mariés et à marier.

 

Décence et sécurité publiques : suivant les ordonnances royales faites par le feu roi Charles, l’on défend à toutes personnes de ne faire aucun vilain serment, blasphème ou jurement, aux peines selon les ordonnances. Et aussi que nul ne porte bâton invasif de nuit, ni de jour, comme dagues, épées, haches, leviers et autres semblables si ce n’est qu’ils soient officiers du Roi ou autre privilèges.

 


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