Pour entendre une voix chanter la Seine, il faut remonter aux frères Goncourt (Edmond et Jules), qui la descendaient chaque été, jusqu’au havre (petit port) de Bar-sur-Seine.
Leur journal, férocement cancanier quand il s’agit des hommes, devient un hymne quand ils parlent de promenades en barque…
« A la Seine, on peut préférer les canaux.
Canal d’Argentolles, canal des Marais, canal du Labourat ou canal abandonné de Saint-Etienne.
Un temps, il m’arrivait de traîner là aux premiers soleils, à suivre les anciens chemins de halage, à éviter les flaques d’averses, à méditer sur une enfance penchée sur le long trait noir du canal du Rhône au Rhin…
On ne dit jamais assez la puissance de mélancolie d’un canal.
On devrait prévenir le promeneur solitaire du danger qu’il court à les longuement fréquenter, l’avertir par de grands écriteaux rouges et or de leur degré de nuisance, comme on le fait sur les paquets de cigarettes et les bouteilles d’alcool :
« Canal interdit aux nostalgiques », « Neurasthéniques s’abstenir », « L’abus de ce canal peut nuire gravement à la santé », « Chemin déconseillé aux dépressifs », « Canal pour peintre du dimanche, seulement ».
Prévenu, le promeneur peut alors rester les fesses aux pierres des écluses mortes, les jambes ballant au-dessus de l’eau verte, à observer les tignasses des algues, les feuilles sournoises des nénuphars, la fragilité vibrionnante (qui vibrionne, qui bouge sans arrêt dans tous les sens) des libellules, et chercher dans l’immobilité glauque le jet de lumière d’une ablette et le fugace d’une perche soleil…
Un autre canal, neuf des ses flancs blancs, relie la Seine en un long tuyau ennuyeux au réservoir du lac de la Forêt d’Orient.
Mais c’est un canal vierge, sans poissons et sans noyés…
Il y a aussi l’immense poésie des mails.
Ce sont les promenades que suivent les bras de Seine. Ils font le tour de la partie basse de la ville et tissent un collier à leur reine.
Leur dessin, disent les dévots, forme la tête d’un bouchon de Champagne, les insolents y devinent davantage une tête phallique.
En contre bas, l’eau n’y est pas farouche. Elle passe, comme les touristes, parce qu’il faut bien passer quelque part.
Le baladin Charles Nodier aimait cette Seine qui s’effiloche dans ces vallons miniatures où, paraît-il, Charles le Chauve et Louis le Débonnaire aimaient à se baigner…».
Les frères Goncourt, Edmond de Goncourt et Jules de Goncourt, ces écrivains français du XIXe siècle, ont naturellement été classés dans « l'école naturaliste ». Ils aimaient beaucoup l’Aube, et chaque été, ils descendaient la Seine jusqu’au petit port de Bar-sur-Seine.
Sur le bandeau du bas de chaque page, vous cliquez sur "Plan du site", qui est la table des matières, et vous choisissez le chapitre qui vous intéresse.
Cliquez sur "Nouveaux chapitres" vous accédez aux dernières pages mises en ligne.