Religion



Les Statuts Synodaux de Jean Colet


Il s’agit d’un ouvrage important, daté de 1530, édité chez Jean Lecoq sous l’autorité de l’évêque de Troyes. C’est une œuvre de Jean Colet, juriste au tribunal épiscopal, natif et curé de Rumilly-les-Vaudes (de 1465 à 1479), qui rassemble les statuts promulgués par Jean Bracque (1370-1375), Jean Léguisé (1426-1450) et Odard Hennequin (15258-1544), évêques de Troyes.

 

Le texte est imprimé en lettres gothiques, d’une qualité parfaite. La plupart des 300 pages de ce livre est rédigé en latin. Une quinzaine cependant sont écrites en français : une innovation à porter à l’actif de Jean Colet qui tenait à ce que les curés de nos campagnes puissent, d’une meilleure et plus compréhensible façon, retransmettre à leurs ouailles, les instructions et recommandations de leur évêque.

 

Ce sont ces 15 pages que je vais présenter en donnant des extraits. « C’est un peu à l’intention des prêtres ignorants et des curés paresseux que Jean Colet a rédigé ces pages en français », pour les inciter à respecter les instructions et recommandations promulguées par les évêques, pour les aider à les faire connaître et respecter dans leur paroisse : « Voilà ce qu’il faut savoir, voilà comment le dire ». En quelque sorte, Jean Colet a rédigé, au XVI° siècle, un catéchisme destiné aux recteurs de nos campagnes.

 

La première préoccupation de l’évêque, transcrite par le chanoine Colet, est le salut des âmes des fidèles  qui sont sous sa garde. C’est à cette fin qu’ont été promulgués les statuts synodaux.

 

Comment mener sa vie pour obtenir le paradis ? « En respectant les dix commandements de la loi et de la Sainte Eglise, en ayant recours aux sacrements, en pratiquant la prière », toutes règles que nous découvrons, dites par Jean Colet il y a 500 ans !

 

Ces statuts de 1530 sont suivis d’une longue partie en français, intitulée : « S’ensuit la manière comment les curés et recteurs des églises paroissiales doivent publier et déclarer à leurs paroissiens les susdits préceptes ». C’est donc une adaptation faite « à l’intention du pauvre peuple chrétien », des statuts qui les concernent. Elle est mise entre les mains des curés qui ne sauraient le faire eux-mêmes.

 

Par exemple, le curé ne se contentera pas de rappeler aux paroissiens leur devoir pascal, il doit aussi les exhorter à se confesser et à communier pour les fêtes de Pentecôte, Assomption  de Notre-Dame, Toussaint et Noël. Il recommandera de payer les dîmes, mais aussi d’accompagner le Corpus Christi quand il est porté aux malades. A la messe, les fidèles devront se tenir agenouillés aussi longtemps que le précieux Corps de N.S. ou son Sang se trouvent sur l’autel. Pour la dignité du sacrement de mariage, défense sous lourdes peines de faire le charivari. De même, les fidèles  doivent respecter le caractère sacré du cimetière, sans y danser, jouer ou  faire le marché. De lourdes peines sont ordonnées contre les blasphémateurs

 

Un long passage est consacré aux excommuniés qui, si l’on en croit la diversité des cas d’excommunication, devaient être fort nombreux.

 

Enfin, l’évêque fait recommander par ses curés l’œuvre (c’est-à-dire la fabrique) de la cathédrale de Troyes, en promettant aux donateurs non seulement des indulgences, mais participation à « toutes les prières, messes et oraisons qu'ont fait les ordres mendiants de l’évêché de Troyes et en tous convents de l’ordre de Citeaux ». A partir de toutes les indulgences concédées par les derniers papes aux fidèles qui célèbrent la Fête-Dieu, le chrétien qui ne manquera rien pourra gagner : « 11.300 jours d’indulgence, qui valent 30 ans et 300 jours » !

 

Le formulaire de prône que les curés sont invités à lire tous les dimanches à la messe paroissiale est riche d’authentique substance chrétienne. Il invite à prier successivement : pour la paix et union de l’Eglise, pour le pape, les évêques et tout le clergé, pour le roi et son conseil, pour tous autres seigneurs terriens, pour les fidèles rassemblés à la messe, pour les fruits de la terre, pour ceux qui offrent le pain bénit, pour les bienfaiteurs de l’église paroissiale, « pour tous loyaux laboureurs et loyaux marchands », que Dieu bénisse leur travail, pour tous les habitants de la paroisse, pour les femmes enceintes, pour les pèlerins, pour les prisonniers, « après nous prierons pour tous ceux et celles qui sont en état de grâce, que Dieu les y tienne jusqu’à la fin. Et pour tous ceux et celles qui sont en péché mortel, que Dieu par sa sainte grâce les en veuille sortir brièvement ». Et encore, pour les trépassés, ceux de nos familles, et généralement pour toutes âmes qui sont en peine du purgatoire. Puis, avant la dénonciation (sans porter de nom) de tous les pêcheurs publics, les fidèles qui auront entendu cette belle conclusion : « Ceux et celles que les commandements de Notre Seigneur tiennent et gardent soient bénis et absouts du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Amen. Et ceux et celles qui ne les suivent pas, que Dieu les veuille convertir et réduire à bien ».

 

« Prions doit dire le prêtre, chaque dimanche, pour que nous soyons délivrés du péché mortel qui nous mène droit à l’enfer. Pensons à l’heure où nous devrons mourir ». « Le paradis, ce royaume de paradis, le prêtre doit l’offrir au pêcheur sur son lit de mort, après l’avoir interrogé et confessé ».

 

Tout au long de son commentaire, Jean Colet manifeste l’inquiétude qu’il a pour les enfants qui risquent de mourir sans baptême. « Pas plus que jurer, les chrétiens ne doivent railler les choses qui concernent et engagent l’Eglise ». « Donnez, doit dire le curé, donnez pour que vivent les prêtres, donnez pour le service du culte mais aussi et surtout, bien expressément, respectez les ministres de Dieu et de l’Eglise. En même temps, fuyez ceux qui, contrairement à eux, cherchent à vous tromper ».

 

Un chapitre spécial est consacré à la lèpre, ce mal impitoyable qui sévissait alors.

 

A travers les statuts synodaux, l’Eglise de Troyes, en 1530, propose au peuple dans un langage qui sait s’adapter à lui, une religion forte, centrée sur Dieu juste et miséricordieux, et sur le Christ rédempteur. L’Eglise institutionnelle y détient le monopole des moyens de salut, par la liturgie et par les sacrements, surtout les sacrements de pénitence et d’eucharistie. Cela exige un clergé zélé et instruit.

 

Ecoutons Jean Colet dans « Les regrets de l’âme damnée » :

 

«  Hélas ! Chrétiens, qui lisez cette histoire,

 

« Autant vous en prend à l’œil,

 

« Laissez, laissez, tandis qu’avez le temps,

 

« Vos ordures et péchés.

 

« N’attendez à demain à faire pénitence ».

 

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