Les Crimes



L’époux volage voulait garder sa femme comme favorite


Sabriat confie son calvaire : "Je suis arrivée d’Algérie à Troyes, à l’âge de 12 ans. A 16 ans, je me suis mise à chercher du travail. J’ai trouvé un emploi d’ouvrière d’usine, puis ensuite de vendeuse. J’étais contente de pouvoir subvenir seule à mes besoins et de ne pas dépendre (comme beaucoup de femmes de mon pays), d’un mari souvent exigeant et autoritaire.

J’ai fui pendant des années, toutes relations masculines. J’avais 24 ans, quand j’ai fait la connaissance de Guy Gayon. Lui était originaire de la région parisienne et se trouvait à Troyes pour quelques jours. Je l’ai trouvé séduisant, je me suis laissée prendre au piège. Nous nous sommes revus à plusieurs reprises. Lors d’un dernier séjour à Troyes, Guy m’a demandé de le suivre à Sucy-en-Brie. Je l’ai suivi.

J’étais tombée amoureuse. Nous avons vécu un an en concubinage. J’avais trouvé du travail comme serveuse dans une cantine d’entreprise et lui était manœuvre sur un chantier. Nous nous sommes mariés le 12 novembre 1971. Mais, petit à petit, j’allais commencer à découvrir son véritable visage. D’abord, en ce qui concernait le travail. J’ai compris qu’il était faignant : il me disait souvent : "le chômage, ce n’est pas fait pour les chiens". Et, il y était souvent.

Alors, il traînait dans les bistrots, il rentrait parfois très tard, dans un état lamentable. Je lui faisais bien sûr des reproches. J’avais besoin d’argent pour nourrir les deux enfants que nous avion eus, David et Nadia. Il me donnait une toute petite partie de ses indemnités et je devais me débrouiller avec cette somme et les allocations familiales. C’était peu. Et dire que j’ai mis tant de temps à me décider à le quitter uniquement à cause des gosses.

Quand il rentrait éméché au milieu de la nuit, il n’hésitait pas à me réveiller brutalement pour que je lui prépare à manger. Si je rechignais, il me frappait. Il était devenu très violent et j’avais peur de lui. Tout prétexte était bon pour me donner une correction. Lui qui passait son temps au café, exigeait de moi une présence permanente.

Si je m’absentais pour aller voir des voisines, il me posait des questions à n’en plus finir. Il était maladivement jaloux. Il disait :"As-tu besoin d’avoir des copines ? Ce sont toutes des traînées". Il avait de nombreuses aventures. Et quand je lui en faisais le reproche, il déclarait :"Ce sont des garces, des passe-temps. Toi, tu es ma favorite, et tu devrais en être heureuse".

J’ai tenu huit ans à ce régime. J’avais rêvé d’une vie de femme libre et heureuse et je n’étais que l’esclave d’un homme. En août 1979, je pris la décision d’engager une procédure de divorce. J’en parlai à Guy et il réagit par des menaces :"Si tu me quittes, je te tue". Un après-midi, je fis les démarches nécessaires. A partir de ce moment-là, pas un seul jour ne se passait sans que Guy ne m’insultât ou ne me frappât.

En octobre 1979, sans attendre que le divorce soit prononcé, je prévenais policiers et avocats et quittais le domicile conjugal pour me réfugier près des miens à Troyes. Pendant quelques mois, je connus un peu de répit. Guy n’avait pas mon adresse et me laissait tranquille.

Et puis, pour les formalités de divorce, il a bien fallu que nous nous revoyions. Guy vint me trouver à Sainte-Savine où j’avais loué un deux-pièces. Il se montra extrêmement gentil :"Tu devrais prendre les meubles, puisque tu as les enfants, je n’en ai pas besoin", me proposa-t-il. Tu peux tout garder, ce que je veux, c’est la paix ! Comme il n’avait toujours pas retrouvé de travail, Guy s’est installé à Troyes. Il me suppliait à chaque rencontre, et même au téléphone, il m’appelait trois ou quatre fois par jour, de reprendre la vie commune.

Un jour où j’avais eu la faiblesse de le laisser entrer chez moi, il m’a battue comme du temps où nous vivions ensemble. Alors, j’ai fui une nouvelle fois. J’ai abandonné mon deux-pièces de Sainte-Savine pour m’installer à La Chapelle-Saint-Luc. Il ne lui a fallu qu’une semaine pour trouver ma nouvelle adresse. Le 6 mai 1980, il s’est caché à proximité du domicile de mes parents auxquels je rendais fréquemment visite et m’a suivie. Il a menacé de dormir dans les poubelles si je ne lui ouvrais pas, et toujours, bien sûr, de me tuer un de ces jours. Il a tenté de me crever un œil avec sa pipe, il a réclamé son droit de visite aux enfants et une fois à l’intérieur, a refusé de partir, à tel point que j’ai été obligée d’appeler la police pour m’en débarrasser.

Enfin, en juin 1980, notre divorce a été prononcé. Mais il n’en a pas tenu compte. Il me téléphonait plus que jamais. Le samedi 26 juillet, il m’a appelée et m’a demandé de lui amener les enfants le lendemain. Je lui ai dit que c’était impossible : Nadia, notre fille venait d’entrer à la clinique de Champagne pour y être opérée de l’appendicite. En disant où était Nadia, je venais de lui apprendre où me trouver.

Le dimanche 27 juillet, il était 14 h 30 quand il a fait irruption dans la chambre de la clinique. Tout de suite je lui ai demandé : est-ce que tu viens pour ta fille ou pour moi ? Si c’est pour moi, tu perds ton temps ! Il m’a répondu :"C’est toi que je viens voir. Tiens prends ça ! " Il m’a tendu une enveloppe, que j’ai saisie machinalement et que j’ai regardée. C’est à ce moment-là, pendant que j’avais les yeux baissés, qu’il en a profité pour sortir son couteau. J’ai eu le réflexe de me jeter en arrière, sur ma chaise. Mais la chaise a basculé, je me suis retrouvée allongée sur le dos, Guy, s’apprêtant à me poignarder. Je me suis protégée avec le bras gauche, la gorge et le visage. J’ai eu les tendons sectionnés. J’ai aussi senti la lame entailler mon cou. Le sang a coulé, je me suis mise à hurler. Ma pauvre petite Nadia hurlait aussi de terreur. Enfin, une infirmière est arrivée, Guy s’est enfui. J’ai appris par la suite que quelqu’un avait réussi à le maîtriser".

Il a été mis en prison, inculpé de coups et blessures volontaires et écroué à la maison d’arrêt de la rue Hennequin. Sabriat et la petite Nadia ont essayé d’oublier l’horreur de ce qu’elles ont vécu, mais il est peu probable qu’elles parviennent avant longtemps, à retrouver la sérénité.

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