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La Bourse du travail


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Au XII° siècle, existe Place Jean Jaurès, une halle au Blé. Après la construction place de la Préfecture d’une halle aux grains, y est construite sous la direction de l’architecte Portret, en 1837, une halle aux tissus, appelée dès 1838 halle de la bonneterie, où les fabricants y vendent leurs marchandises dans 65 comptoirs.

 

Dans la séance du Conseil Municipal du 25 août 1895, le maire Edmond Delaunay s’interroge pour savoir si la ville doit continuer ou modifier l’affectation de la halle. Le rapport de la Commission de la voirie et des bâtiments donne ses conclusions lors du Conseil municipal du 13 décembre 1895, en proposant de renouveler l’adjudication aux négociants et fabricants pour 6 ans, à partir du 25 décembre 1895, pour le rez-de-chaussée, et de transformer le 1er étage en salle de réunion, de concerts, de fêtes. Et le 14 septembre 1896, la Corporation des bonnetiers inaugure cette nouvelle salle des fêtes, avec orchestre et danses.

 

Lors du conseil municipal du 24 décembre 1896, le maire Louis Mony, radical modéré, informe qu’il a reçu de différentes chambres syndicales ouvrières, une demande de création d’une Bourse du Travail à Troyes. Le 28 février 1897 c’est une inauguration politique de la salle à l’occasion du banquet (600 couverts) et de la conférence du leader et théoricien radical Léon Bourgeois (de la loge maçonnique « La Sincérité »). Mais les transactions s’effectuant autrement (les chemins de fer permettent de sillonner toute la France, le réseau téléphonique se développe, les commissionnaires et les courtiers prennent de plus en plus d’importance…), la halle perd de son utilité et elle est fermée en 1904.

 

Lors de la réunion du Conseil Municipal du 13 janvier 1906, un des opposants les plus farouches, est un conseiller ouvrier, le citoyen Brannecker luttant depuis 25 ans pour la conquête du droit syndical, revendique son droit de parler. Le Maire lui donne la parole : « En abordant cette discussion, je ne me fais pas d’illusions, je n’espère pas changer votre opinion sur les Bourses du Travail ni vous faire revenir sur votre décision de créer dans notre ville une institution que vous croyez utile et que vous vous croyez obligés de réaliser. En cela, je diffère d’opinion avec vous… Je sais bien, mais cela m’est indifférent, qu’en combattant la création d’une Bourse du Travail, qu’en faisant connaître les raisons qui m’en font être un adversaire résolu, après en avoir été un partisan actif, je vais déchaîner contre moi la colère de ceux qui comptent s’y installer en maîtres et en tirer les avantages qui, depuis longtemps, excitent leurs convoitises. Mais, qu’ils m’injurient ou qu’ils me raillent, qu’ils s’efforcent de me rendre ridicule et odieux à la classe ouvrière à laquelle je m’honore d’appartenir, que j’aime comme on aime sa famille, que je sers de mon mieux mais en toute indépendance et toute sincérité, cela, ne saurait troubler ma tranquille indifférence… Malheureusement, des politiciens révolutionnaires, agitateurs par instinct, par plaisir ou ambition, se sont introduits dans les syndicats, les ont détournés de leur but, en ont fait des clubs révolutionnaires, ont gaspillé leurs ressources qui auraient dû autrement employées. Des Bourses du Travail, ils en ont fait autant de foyers d’agitation, de quartiers généraux de l’émeute, causant des troubles et des conflits incessants...     Ils ont semé la haine et la discorde au sein de la classe ouvrière, elle-même, fait fuir les syndicats ouvriers désireux de réaliser les progrès, les améliorations réclamées et nécessaires par des moyens pacifiques : dénoncer comme traîtres les ouvriers qui se permettaient de discuter l’opportunité des moyens révolutionnaires et d’y résister. J’ai vu une grève de bonnetiers conduite par un mastroquet, un perruquier et un marchand de nougat… Aujourd’hui, à 20 ans de distance, je constate la faillite du syndicalisme qui n’a pas pu regrouper plus de 10 % des travailleurs. Il suffit de se rappeler les faits qui se sont passés dans certaines Bourses du Travail… Pour connaître le résultat de cette gestion prenons le journal de Jaurès, « l’Humanité » du 15 avril 1905, et lisons dans le compte-rendu de la séance du Conseil municipal de Paris, de la veille, ces lignes qui nous édifieront : << Séance pénible et douloureuse, où la gestion de la Bourse du travail est dénoncée. Des faits honteux de brigandage sont rapportés qui ne sont que trop vrais. Certains syndicats se retirent de la Bourse du travail, pour ne plus exposer leurs membres féminins aux outrages de quelques malandrins… dégradations faites à l’immeuble, vols au préjudice de la ville et des syndiqués, violences, outrages aux mœurs se multiplient depuis 1 an >>. Si je voulais vous faire connaître de tels faits, je serais obligé de vous demander M. le Maire de prononcer le huis clos. Et ce n’est pas qu’à Paris ! Les Bourses du Travail de Lyon, Alger, Tours, Bourges, Oran… sont fermées. Pourquoi ? Parce que les violents s’imposent, siègent en permanence dans les Bourses du travail, où ils vivent aux dépens des subventions et des ouvriers crédules et bénévoles qui les écoutent… Le congrès des syndicats de l’Aube veut l’autonomie de la Bourse du travail, mais à aucun prix se soumettre à une réglementation, ni rendre compte de leur gestion aux Municipalités, et ils demandent cependant des subventions. C’est en réalité des fonds secrets qu’ils réclament. Moi qui les croyais des adversaires de ces sortes de fonds, seulement utiles aux gouvernements bourgeois. Encore une de mes illusions qu’ils me font perdre ! En résumé, les Bourses du Travail n’ont servi jusqu’alors qu’à une poignée de mauvais bergers ambitieux, qui réunissent le pauvre troupeau d’ouvriers dociles et crédules à qui ils promettent de les conduire vers les gras pâturages, mais en réalité pour s’en servir comme d’un tremplin, l’exploiter et le dépouiller du peu de laine qui lui reste sur la peau. Pensez-vous qu’il en sera autrement ici ? Si oui, vous êtes dans l’erreur, car le même esprit anime les révolutionnaires d’ici et d’ailleurs… C’est à se demander si nous nous trouvons en présence de citoyens sérieux et sincères ou en présence de fumistes.

 

La discussion close, malgré cette intervention, le rapport de doter la Ville de Troyes « d’un monument qui planera au-dessus de tous les autres, et pour les services qu’il rendra à la démocratie laborieuse », le Conseil adopte la transformation de cette Halle, en Bourse du Travail. La ville décide de mettre pendant 100 ans, de 1906 à 2006, gracieusement les espaces du rez-de-chaussée de la Bourse à disposition, entre autres, d’organisation syndicales, principalement la CGT, d’association de défense des locataires, de soutien des « accidentés de la vie ».

 

A partir de 1906, la Bourse du Travail devient lieu de rassemblement et point de départ de toutes les manifestations. Elle a vécu de belles journées, comme le 9 avril 1911, avec la révolte des vignerons, Gaston Checq haranguant plus de 20.000 manifestants. Deux jours, avant l’entrée de la France dans la première guerre mondiale, le lendemain de l’assassinat de J. Jaurès, 2.500 personnes se retrouvent devant la Bourse pour manifester en faveur de la paix. En 1914, la Bourse accueille la Société d’Etudes et d’application sanitaires de l’Aube, la Société d’Education Familiale, la Mutualité Maternelle de l’Aube, la Société de secours mutuels des bonnetiers de la Ville de Troyes, la Société de Soulagement entre les ouvriers tanneurs, corroyeurs, chamoiseurs, mégissiers et pelletiers de Troyes, la Société de secours mutuels des anciens sous-officiers de l’Aube.

En 1932, une salle des fêtes est installée au 1er étage, avec une scène, où de nombreuses pièces sont jouées, avec des galas de boxe, des expositions de fleurs, de peintures… La Bourse sert aussi aux meetings politiques, des hauts parleurs retransmettant place Jean Jaurès des débats très vifs, avec des ténors comme le député André Mutter.

 

En 2006, la municipalité décide la reconversion de la Bourse du Travail, dans son projet de requalification et de redynamisation du centre-ville. Le nouveau projet municipal a, selon le maire François Baroin, l'ambition : « d'apporter un véritable contenu économique à cette opération, en développant une offre commerciale forte et cohérente pour conforter l'attractivité commerciale du centre ville ».

 

La presse du 18 octobre 2014 titre : « Bourse du Travail : tout est à refaire » ! Lors du Conseil municipal du 17, la Municipalité informe que l'aménageur Frey s'est retiré de ce projet. Le maire François Baroin réaffirme sa volonté de trouver une issue dans les meilleurs délais : « Nous avons des projets, nous avons l'intention et nous réussirons sur la Bourse du travail ».

En juillet 2017, alors que des ouvriers creusent une saignée dans le jardin de la Bourse du Travail, des morceaux de 2 statues, dont 2 têtes ont été reconstituées, sont mise à jour. Elles portent des marques de dorure et de polychrome, et semblent dater du XVI° siècle.


       Enfin, en septembre 2018, après de nombreuses péripéties, compromis et négociations, le permis de construire est accepté. Eric Peters, Nicolas Pierre, Grégory et Michel Dufau peuvent enfin enclencher la phase travaux de la Bourse du Travail.

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