Je me rends près d’Ervy-le-Chatel au Château de Bois-Gérard. Cette demeure date du XVIII° siècle, au milieu d’un immense domaine. Je rencontre Madame le Maire, puis des habitants. Voici ce que j’apprends.
En 1723, les châtelains de Bois-Gérard, le comte de Cambrissac et sa femme sont trouvés morts, empoisonnés par leur fille que l’on aurait retrouvée morte, à demi dévorée par les loups. Les Cambrissac sont très riches. Leurs successeurs se donnent la mort, l’un par la corde, l’autre en se noyant, pour les beaux yeux d’une fille retrouvée égorgée et éventrée dans un bois. Le dernier occupant, sa gouvernante-maîtresse et son cocher, sont carbonisés, en 1821, après avoir été assommés par une bande de brigands qui ont mis le feu au manoir et l’ont mis à sac. Arrêtés, les trois bandits sont guillotinés.
Ambroise Bazin, naît à Troyes en 1872. C’est un important industriel en bonneterie. En 1928, il cède ses fabriques à ses cousins, et se consacre à la chasse et à l’élevage des chiens, à Bois Gérard. Il y vit avec son amie Elisabeth Constant. Il possède 2.000 hectares de terres et de forêts, et est propriétaire de luxueux hôtels à Troyes et à Paris. Son équipage de Haut Poitou et Saintongeais descend des chiens blancs de Louis XIV. Il consacre son temps à ses chiens et à ses chasses à courre avec son fidèle piqueur, Edouard Prieur. Il est milliardaire, mais brutal, rapace. En 1933, André Bazin perd sa compagne. Il rebâtit la chapelle du château, et fait cimenter 6 caveaux. Un pour sa maîtresse, un pour lui, et les autres, pour ses meilleurs chiens.
Ses employés ? Le plus ancien, Stanislas Woznick et sa femme polonaise, plus 3 Yougoslaves : Ivan Jéric, Joseph P., et le Polonais Louban, confident du châtelain. André Bazin, embauche en 1942 « la belle Nadia », Polonaise et en fait sa maîtresse. Il est très riche, et on dit qu’il a caché des lingots d’or dans les murs de son château. Il entretient une meute de 150 chiens dont s’occupe Louban. Il a aussi à son service Désiré Lecole, faisant fonction de garde-chasse, jardinier, et un régisseur, Lucien Lardin. Un prisonnier évadé arrive un jour au château. Claude est un légionnaire de 22 ans, un costaud, qui a chassé les fauves en Afrique. Bazin veut se l’attacher comme garde-chasse. Nadia la sensuelle, veut elle aussi retenir ce beau garçon, revenu d’outre-Rhin. Il y a dans le voisinage, des maquisards, et il faut bien que d’une manière ou d’une autre, ils assurent leur ravitaillement. Sans doute ont-ils entendu dire que le châtelain de Bois-Gérard a reçu chez lui des officiers allemands et ont-ils jugé qu’ils auraient par conséquent grand tort de se gêner avec lui. Claude disparaît. Un employé et Nadia vont à sa recherche. Le légionnaire est retrouvé, deux balles lui ont perforé les poumons. Bazin le conduit à Troyes, chez un chirurgien. Le châtelain lui fait signer une plainte pour homicide volontaire, et lui-même en signe une autre pour vol de 2 chevaux et de volailles, oies, poules, faisans… Quelques jours plus tard, Stanislas est appréhendé. Restés sans emploi, ils sont passés, faute de mieux au maquis, dans le groupe Jacquinet, qui est une fripouille confirmée. Inculpés d’assassinat du garde-chasse ils veulent faire retirer ses plaintes par Bazin. En conséquence ils programment une visite pour le 9 février au soir. Jacquinet la commande, escorté par 3 autres maquisards. En pleine nuit, ils se présentent au château pour réclamer des explications Jacquinet a les plans des lieux. Mais, après avoir pénétré dans la propriété, les chiens hurlent. Au 1er étage, de la chambre de Bazin filtre des traits de lumière. Le châtelain se refuse de leur ouvrir la porte. Ils entrent par la fenêtre de la cuisine et, tout de suite, la discussion prend une tournure violente. Les maquisards ont des mitraillettes. Bazin n’est pas armé, mais Désiré Lecole, qui l’a rejoint dans sa chambre à coucher dès qu’il a entendu frapper à la porte d’entrée, est descendu avec son fusil. Finalement, le châtelain donne à son jardinier l’ordre de tirer dans le tas. Une grêle de chevrotines atteint Jacquinet au visage, et les maquisards battent en retraite, non sans lâcher une rafale de mitraillette. Le lendemain, une traction avant arrive pour descendre le châtelain, sa Polonaise et le jardinier Désiré Lecolle qui a tiré sur lui. Les 34 tueurs, alcoolisés, leurs crimes accomplis, pillent le château et le caveau de la chapelle. Les habitants le font aussi.
Maître Babeau, beau-frère de Bazin, et sa belle-sœur, Madame Salé, viennent sur les lieux, chercher l’or, dit-on. Ils font soulever les plinthes, les planchers, ausculter les murs, payant des radiesthésistes.
Dénoncés par un milicien mêlé à l’expédition, Robert Macé et 6 autres de son groupe sont arrêtés. Ils reconnaissent avoir tiré sur les 3 victimes. Ils sont fusillés.
Bazin mort intestat. Ses biens reviennent à ses héritiers directs, qui après s’être débarrassés de la meute, vendent terres et bois. Louban demeure le serviteur du bâtonnier Babeau.
Un jour, des gendarmes trouvent une feuille de papier dans une excavation du mur de la chapelle. C’est le testament de Bazin, faisant de Lardin son légataire universel. Maître Gillet déclare que c’est un faux. Le domaine reçoit la visite de cambrioleurs qui recherchent les lingots d’or.
En 1951, un prêtre radiesthésiste, propose ses services aux héritiers de Bois-Gérard. Il ressort avec une valise semblant assez lourde. J’apprends qu’à cette époque, Lardin souffrant de sciatique va consulter un curé, très bon guérisseur, dans un département limitrophe. Le prêtre lui dit que s’il ne répète pas ce traitement près d’une heure par jour, pendant une semaine, cela n’aura servi à rien. Notre homme réfléchit, mais indique qu’il ne peut venir que 2 fois par semaine, qu’il ne connaît personne pour habiter ici… Le curé lui propose de le loger, contre quelques travaux de jardinage, et qu’il le gardera une semaine. Affaire vite conclue, au grand soulagement du malade. Bien qu’ayant largement 70 ans, le prêtre est encore une force de la nature, par contre, il ne semble pas très riche, avec sa soutane usée, noir verdâtre. Lardin va un matin, chercher du pain. Traversant la rue il glisse dans le caniveau, et sa tête cogne contre le trottoir. L’homme sent qu’il va mourir, et demande à se confesser. En remerciement pour l’avoir soulagé, il aurait dévoilé au prêtre un emplacement dans le château de Bois-Gérard, où serait cachée une cassette avec des pièces d’or, en lui faisant promettre de partager avec sa famille.
La femme de Bazin a quitté le pays en 1951…
Notre curé guérisseur prend sa retraite à 75 ans, personne ne sait où il s’est retiré !
J’enquête dans le pays du guérisseur, et découvre qu’en 1951, un jeune handicapé reçoit d’un donateur anonyme, un fauteuil électrique, que la cabane d’une jeune veuve avec 3 enfants, sans travail, est complètement rénovée, grâce à un don anonyme, qu’une bourse est offerte à un jeune pour qu’il puisse poursuivre ses études en faculté…
En 1960, le domaine est légué par les héritiers de M. Bazin à la fondation ATD Quart Monde. Fin 1999, ATD met la propriété en vente pour le plus grand bonheur de Michel Magat, Valentina Vitale et leurs 4 enfants, qui ouvrent ce château à la culture : expositions, spectacles, concerts, conférences ou stages, tout est possible dans cet endroit privilégié où même l’hébergement est prévu dans un cadre confortable et harmonieux. Ces nouveaux propriétaires me confient qu’ils surprennent plusieurs fois par an, dans leur propriété, des visiteurs armés de poêles à frire ou autres pendules, leur promettant, si on les laisse travailler, de partager avec eux le fruit de leur trouvaille !
D’après mes investigations, il semble vraisemblable que le trésor des Cambrissac a bien existé, et qu’il a été retrouvé !
Mais… cela n’a jamais été prouvé.
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