Tous les peuples à travers les âges, toutes les religions dans tous les temps, toutes les puissances à toutes les époques ont compté sur les fêtes et cérémonies somptuaires pour attirer et attacher les individus à leurs doctrines.
Talleyrand a écrit : " nous voulons conduire au bien par le plaisir ".
La Révolution, elle aussi, a décrété les fêtes comme partie essentielle de l’éducation publique. " L’éducation de l’homme se fera par les fêtes ", a écrit Michelet, le grand et divin poète de l’Histoire de la Révolution française. C’est de ces paroles que les assemblées révolutionnaires se sont inspirées pour régler les fêtes et cérémonies nationales, pour honorer les différents âges de la vie, exalter les vertus sociales du travail, la reconnaissance et célébrer les grands événements historiques de l’époque.
Dans toutes les périodes de l’histoire de France, la Révolution est celle qui a vu le plus de ces manifestations solennelles collectives.
Le culte de la Raison des Hébertistes athées (automne 1793-printemps 1794), puis le cycle de l'Être suprême des Montagnards déistes (printemps 1794-été 1794) sont, en France, un ensemble d'événements et de fêtes civiles et religieuses. Le théophilantropisme, une émanation du culte de l'Être Suprême, est apparu en 1796 et a été interdit en 1803.
Ces "cultes" sont des élément de la déchristianisation qui a accompagné la Révolution Française. Ils trouvent leur justification dans une certaine forme de résistance physique, la recherche de la défense des acquis de la Révolution Française, notamment la liberté.
Ces "cultes" eurent leur apogée pendant la Terreur, avec le " culte de l'Être Suprême ".
La Révolution a eu le " culte " de ses grands jours et de ses grands hommes à Troyes, comme ailleurs, aucune de ces dates mémorables n'a été oubliée.
Après la prise de la Bastille, le pays est troublé par la résistance des états provinciaux, des parlements et aussi par la menace des bandes de pillards qui ravagent les campagnes, coupent les blés, dévastent le pays, et, comme dit Michelet :" Tuaient l'espérance ".
Pour s'y opposer, le peuple s'assemble et forme des milices qui s'organisent à Troyes, en octobre, sous le nom de gardes nationales, pour garantir l'ordre, la liberté et défendre la Patrie.
Le 9 avril 1790, la municipalité de Troyes et l'état-major de la garde nationale écrivent à toutes les municipalités et gardes nationales des districts pour préparer une manifestation imposante " contre les ennemis de la Révolution " et les engager à former entre elles une confédération générale.
Voici quelques unes de ces fêtes :
- la première est celle de la Confédération des municipalités et gardes nationales du 9 mai 1790, due à un mouvement de la France vers l'unité, à la suite de sa division en départements. La ville est en fête pendant plusieurs jours. Je lis dans le Journal de Troyes : " le dimanche il y eut bal à l'Arquebuse et le lundi à la Comédie. Le mardi, un banquet fut offert par les officiers de la garde nationale et un bal organisé par les grenadiers. Après le banquet, les participants sortirent sur le mail de la Madeleine (boulevard Gambetta) et offrirent le spectacle du défilé d'une troupe de 800 frères tous en uniformes, ou en pompons de couleurs différentes, mais tous animés d'un même esprit de concorde, une main armée pour la liberté, l'autre passée sous le bras d'un camarade et on aura une idée de cette marche civique dont on a peu d'exemples et qui peu faire époque dans les annales de la liberté. Musique en tête, la troupe se dirigea vers l'abbaye de St-Loup. Les chanoines avaient préparé une cordiale réception. Le soir, un grand bal termina la fête et l'on y chanta des couplets patriotiques ".
- le 14 juillet, anniversaire de la prise de la Bastille et de la Confédération générale (1789-1790), la fête se tient place St-Pierre, avec distribution de pain, danses, banquet et une illumination générale,
- le 21 janvier, anniversaire de la mort de Louis XVI (1793),
- le 31 mai, anniversaire de la proscription des Girondins et triomphe de la Montagne (1793),
- fête du 10 août, anniversaire de la chute de la royauté assassinée aux Tuileries (1792),
- lors de la Terreur, le Temple de la Raison : les églises fermées, la cathédrale devient le Temple de la Raison, représenté chaque décade, par une pauvre fille, que l'on coiffe d'un bonnet phrygien pour l'installer sur l'autel. Sur le maître-autel, une statue de la Liberté remplace le tabernacle. " La messe républicaine " y est célébrée, pour " faire oublier la catholique ". Le choeur est converti en salle de danse et la musique occupe une partie des stalles. C'est le lieu des véritables fêtes des sans-culottes. Il y a de belles scènes de débauche, les chapelles des bas-côtés donnent asile à toutes sortes de spectacles. Certains font l'amour sur les autels, d'autres se livrent les uns les autres à tous les jeux de la passion, des prostituées qu'aucun décret ne régit, racolent à qui mieux mieux...
- le calendrier républicain fait place au calendrier grégorien, et le décadi au dimanche, où il n'y a plus de cérémonies religieuses. Les fêtes républicaines sont célébrées tous les 10 jours,
- fête du 2 Pluviôse, fête de l'Être Suprême : " que vos portes soient garnies de drapeaux tricolores et de verdure, que vos enfants soient propres et prêts à 5 heures du matin... que ceux qui ont des garçons de 7 à 12 ans, les arment d'une pique de bois ou de fer de 6 pieds de haut... que le tambour et le canon soient votre horloge... soyez dociles et souples à la voix des commissaires...". Il y a un défilé à travers la ville, avec le chant d'un hymne au Dieu des Combats,
- fête du 10 Germinal, consacré à la jeunesse,
- le 10 Floréal, fête des époux, avec un cortège qui fait le tour de l'Arbre de la Liberté, place du Temple décadaire, la musique qui exécute " Amour sacré de la Patrie " devant la Maison Commune où il y a des danses et des jeux,
- le 10 Prairial est consacré à la reconnaissance,
- la journée du 10 Messidor, pour l'Agriculture, annoncée à 5 h du matin par un commissaire de police accompagné des tambours et du trompette, à 7 h par la cloche du Temple décadaire, et à 8 h par un coup de canon, avec un grand défilé dans la ville, et la journée est employée en jeux et danses,
- la journée du 10 Thermidor est consacrée à la Liberté,
- le 10 Fructidor à la vieillesse,
- la fête du 1er Vendémiaire avec un caractère de solennité imposant et conforme à la dignité de la grande nation, d'après les instructions du ministre de l'intérieur,
- à Mirabeau, Voltaire, Rousseau, Marat, Lepeletier de Saint-Fargeau, les honneurs suprêmes sont rendus dans des apothéoses magnifiques,
- la nature enchanteresse avec les âges et les vertus morales, le mariage... ont leur part de glorification.
Ces fêtes ont fait l'objet de cérémonies, pour la plupart fort bien réglées, qui se sont déroulées dans le calme et avec la dignité fermement recommandés par les circulaires du pouvoir central.
Il est à remarquer que dans ces fêtes savoureuses, les fleurs et les chants ont joué un grand rôle. En principe, il est fait une station au pied de l'Arbre de la Liberté, où l'orchestre exécute l'air " Amour sacré de la Patrie ".
Inspirés des vertus de l'antique, les hommes de la Révolution haussèrent leurs pensées et leurs regards vers l'idéal, ils luttèrent pour l'y atteindre, mais agités de passions impétueuses, ils succombèrent sous elles.
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