Au 1er siècle, Troyes, capitale des Tricasses prit le nom d’Augustobona, en souvenir de son bienfaiteur l’empereur Auguste.
L’aqueduc romain de Troyes est une découverte archéologique qui nous livre un des témoins les plus importants de la vie des Romains ! Il date vraisemblablement de cette période où l’Empire romain parvint à sa juste grandeur.
Il y a plus de 20 siècles, Troyes avait son adduction d’eau !
En face de l’église Saint-Nicolas, en bordure du boulevard Victor Hugo, en 1962, le chantier de l’entreprise Rasetti, entreprenant le terrassement de l’immeuble de grand standing, fit apparaître les traces d’une grande tranchée et d’anciennes excavations comblées, de plans circulaires et quadrangulaires. Il apparut que ces dernières, localisées dans l’angle formé par le boulevard et la rue Jeanne d’Arc, étaient d’anciennes caves du Moyen Age, établies à même le tuf, sans revêtement ni voûtes de maçonnerie, à une profondeur de 3 à 6 mètres. Une tranchée, afin de trouver le sol ferme pour établir les fondations du futur immeuble, fit découvrir de beaux débris d’enduit romain, restes d’un conduit d’aqueduc. Bientôt, les ruines de cet aqueduc, dont l’existence était totalement inconnue, étaient mises à jour, en bordure du boulevard Victor Hugo. Ces ruines sont apparues dans l’état où les ont laissées les chercheurs de pierres du Moyen Âge qui récupéraient partout des matériaux pour édifier principalement les remparts de la ville. C’est là, en effet, l’un des témoins les plus importants de la vie des Romains.
Les aqueducs étaient dans la vie quotidienne des Romains, de tout temps grands amateurs d’eau courante, avec des fontaines et des thermes. Je ne sais pas si à cette époque de la création de l’aqueduc, il y avait un traité comme à Rome. Ces aqueducs étaient construits en canal souterrain pour mieux les soustraire aux variations de la température, et aussi pour dérouter l’ennemi et les « voleurs d’eau ». Ces derniers étaient sévèrement condamnés et quiconque souillait l’eau sciemment là où elle jaillit pour l’usage public, devait payer une amende de 10.000 sesterces. Egalement, quiconque aura sciemment et par manœuvres frauduleuses, percé, rompu, fait percer ou fait rompre ou détérioré des canaux, conduits, arches, tuyaux, châteaux d’eau, bassins des aqueducs publics… empêchant l’arrivée l’eau à la ville, sera condamné à payer au peuple romain, 100.000 sesterces.
Les ruines retrouvées boulevard Victor Hugo, nous prouvent que l’aqueduc arrivait aux abords de Troyes, dans la partie la plus dominante. Dans ce trajet souterrain, le conduit était établi dans un blocage d’excellente maçonnerie de petits moellons de pierre dure provenant du sud du département de l’Aube, « noyés dans un mortier de chaux et de sable avec quelques rognons de silex ». Le soin principal des constructeurs avait été reporté sur le revêtement intérieur composé de plusieurs couches de ciment formé de poteries et tuileaux finement pilés. Ces couches superposées constituaient un enduit imperméable épais de 6 cm en moyenne, l’« opus signinum », qui avait été recouvert soigneusement d’un badigeon hydrofuge rouge, la « maltha », dont Pline l’Ancien nous donne la composition et le mode d’emploi : « La maltha se fait de chaux récente en motte, éteinte dans du vin et pilée avec du saindoux et des figues. On en étend ordinairement 2 couches. Nul enduit n’est plus tenace, il est plus dur peut-être que la pierre. La muraille qu’on traite par la maltha doit être préalablement frottée d’huile ». Imaginez ce travail qui était exécuté sur des kilomètres. Dans ce type d’aqueduc, l’eau n’était pas amenée sous pression, mais coulait comme dans un ruisseau. Ni les distances, ni les collines, ni les vallées n’arrêtaient les Romains dans la construction de leurs ouvrages d’art. Pour alimenter Augustobona, ils ont allés capter de bonnes sources, jusqu’à 10 ou 15 kilomètres de la ville, à la base des collines de craie, sur les territoires de Bouilly ou Servigny, par exemple. La fontaine Nago a sans doute été utilisée à l’époque romaine, car située à une altitude d’environ 120 mètres, car il était possible de la capter pour alimenter notre aqueduc dont le radier est à environ 112 mètres à l’entrée de Troyes. Sachant bien calculer les niveaux, les Romains se contentaient d’une pente très douce. Au point précis où les ruines ont été retrouvées en bordure du boulevard Victor Hugo, la pente était au plus de 3,20 mètres au kilomètre. Le conduit mesurait 0 m. 86 de hauteur à l’origine et devait être recouvert de dalles de pierre. Sa largeur était de 0 m. 48 à la base. On ne peut donner qu’un chiffre très approximatif du débit de l’aqueduc : 56.000 mètres cubes peut-être par 24 heures. D’ailleurs, il pouvait exister un second aqueduc pour alimenter Augustobona, car il existe, à l’est de Troyes, dans la plaine de Foissy, des restes d’importantes maçonneries, qui semblent être les vestiges d’un aqueduc romain.
L’archéologue Président de la Commission Supérieure des Monuments Historiques a écrit en 1962, que « les vestiges de cet aqueduc, ouvrage insoupçonné et magnifique, par le luxe de sa construction se trouve être l’égal des plus fameux ».
La découverte du Boulevard Victor Hugo prouve l’importance d’Augustobona, ancienne capitale des Tricases, et peut-être, laisse présager de nouvelles et bonnes trouvailles.
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