La vie à Troyes



Les écoles à Troyes, le premier collège



 

Les écoles ont pris naissance à l’ombre des cathédrales, des collégiales et dans les monastères.

 

A Troyes, les premières écoles sont fondées par saint Loup, une dans le monastère de Notre-Dame et une, consacrée à l’éducation et à l’instruction des femmes dans l’abbaye de Notre-Dame-aux-Nonnains, ayant surtout pour but de former des sujets pour le sacerdoce et le service de l’Eglise. Ces écoles étaient divisées en 2 classes, les grandes et les petites. L’enseignement comprenait la grammaire, la musique et la théologie. Parmi les personnages célèbres qui reçurent, dans les écoles tricassiennes, les bienfaits de l’instruction, on compte saint Camélien, successeur de saint Loup au siège de Troyes, saint Aventin, saint Mesmin, saint Polichrôme évêque de Verdun, saint Sévère de Trèves et saint Alpin de Châlons. Au VII° siècle, notre évêque Ragnégésile entretient à ses frais, cette école épiscopale Troyenne, où saint Frobert se fait remarquer par sa science.

 

Ces écoles sont des séminaires où les prêtres enseignent la lecture, l’écriture, le chant, la langue latine, la connaissance des rites et des cérémonies religieuses, puis plus tard, la grammaire, la dialectique, la rhétorique, la géométrie, l’astrologie, l’arithmétique et la musique.

 

Au IX° siècle, Charlemagne et Alcuin trouvent l’enseignement bien organisé à Troyes.

 

Après le démembrement de l’empire de Charlemagne, la plupart des écoles qu’il a fondées disparaissent peu à peu, mais celles de Troyes restent ouvertes pendant tout le moyen-âge.

 

C’est aux Ecoles de Troyes qu’avait étudié le célèbre Olbert, abbé de Gembloux, qui vivait à la fin du X° siècle. L’école épiscopale avait eu parmi ses écolâtres, au cours du même siècle, Aderald, surnommé « l’ornement de l’Eglise, la gloire du monde, le maître des chrétiens ». Pierre, dit Comestor, chanoine  de l’église cathédrale de Troyes, et doyen en 1147 et 1174, avait été professeur à ces écoles avant d’être nommé chancelier et Thibault évêque de Châlons-sur-Saône. C'est à Troyes qu'ont étudié les 2 plus grands trouvères Chrétien de Troyes et Thibaut IV le Chansonnier, et que la prose française est née avec Villehardouin et Joinville.   

 

Au XIII° siècle, les écoles de Saint-Jean, Saint-Remy et Notre-Dame, constituaient ce qu’on appelait les Grandes Ecoles. On y enseignait la grammaire, le latin et les premiers éléments des sciences mathématiques. C’était alors l’enseignement supérieur à Troyes. Puis venaient les Petites Ecoles où l’on apprenait seulement à chanter, écrire et lire.

 

En 1304, la reine Jeanne de Navarre (comtesse de champagne, épouse de Philippe le Bel) institue par testament, un collège en faveur des pauvres étudiants.

 

En 1378, le pape Grégoire XI fonde à Troyes, une nouvelle école épiscopale qui est installée rue Charbonnet. A la fin du XIII° siècle, il y avait une autre école dépendant de l’abbaye de Montier-la-Celle.

 

Au XIV° siècle, il existait des écoles dans quelques rurales du diocèse. On y constatait une coutume bizarre et pleine de barbarie : le maître d’école de Ramerupt devait fournir chaque année un coq à ses jeunes élèves, pour leur procurer le plaisir de jeter des bâtons sur cet animal. En 1358, il existait à Troyes un « bachelier des écoles », nommé Jean de Loches. C’est le premier connu.

 

Pendant le XIV° et le XV° siècle, les religieux Cordeliers dirigent le collège. Pendant la période de 1435 à 1461, du traité de paix signé à Arras à la mort de Charles VII, les écoles reçoivent de nouveaux règlements et sont plus fréquentées que par le passé. Les Frères-Prêcheurs ou Jacobins tiennent aussi école dans leur maison. En 1449, il y a une école tenue au presbytère de Saint-André. A Courteranges, dépendant de la seigneurie de l’abbaye de Montiéramey, le curé, ayant ouvert une école, est condamné par l’official à la fermer, parce qu’il ne s’est pas pourvu du contentement de l’Abbé. Par l’assemblée de la Saint-Barnabé de 1468, il est accordé 40 sous, afin de « aider les maîtres de la Grande-Ecole à payer le loyer de la grange où se tient l’école ». L’année précédente, les leçons avaient cessé, et l’école avait été fermée, pendant plusieurs mois, à cause de la peste. Après la peste, les écoles paraissent peu fréquentées. « Afin d’empêcher la ruine des écoles », le chapitre de Saint-Pierre oblige les maîtres des écoles à garder les statuts, règlements et immunités des écoles et à obéir au recteur. En 1481, Me Pierre, prêtre, est recteur des écoles. Pendant plusieurs années il reçoit une pension annuelle de 16 livres. En dehors de la grande école tenue dans la maison de Jean de Vitel, la ville renferme plusieurs petites écoles : Simon Maçon, prêtre, a 5 élèves, suivant ses leçons de grammaire, messire Pierre Lacaille a le même nombre d‘élèves, messire Jean Bonnin en a 25 sous sa férule,  Me Pierre Savine est aussi maître d’école, Jacques Guillemin et Jean Pissot régentent ensemble. Troyes a donc 3 clercs et 5 laïques qui tiennent école. L’évêque Jean Léguisé a édicté en 1436 un règlement  général sur l’instruction dans les écoles de son diocèse et leur gouvernement. C’est un document du plus grand intérêt (l’original est aux Archives de l’Aube) : l’année scolaire commençait à la Saint-Jean le 24 juin. En 1488, la grande école a été fermée par suite de difficultés touchant la maîtrise. En 1489, le conseil ouvre une souscription volontaire pour subvenir aux besoins des écoles. Mais les écoles ouvertes sont de nouveau fermées, car la peste et même la syphilis, dans toute leur force épidémique, obligent à prendre cette mesure.    

 

En 1539, les deux frères jumeaux, Jean et Nicolas Pithou, suivent les cours du collège des Cordeliers.

 

A l’époque de la Renaissance, les anciennes écoles deviennent insuffisantes. La municipalité obtient du roi François II en 1560, la création d’un collège.

 

Le collège ouvre en 1564, avec l’autorisation de Charles IX, dans les locaux de la Grande Ecole de Saint-Remy, et dans ceux de l’ancienne hôtellerie de la Licorne. La grande école donnait rue Gambey, et l’entrée de la Licorne était Grande-Rue. Le collège ne reçoit que des élèves externes. En 1567, « un cahier » demande que les écoles publiques ou particulières ne soient tenues que par des personnes vues et reçues par les évêques ou leurs délégués. En 1598, les bâtiments du collège tombant en ruine, Mme de Dinteville, femme du lieutenant au gouvernement de Champagne lègue une somme pour la reconstruction du collège. En 1570, la religion catholique  est rétablie partout où elle a été suspendue, mais aucune distinction ne doit être faite, pour cause de religion, dans les universités, écoles… En 1576, l’établissement d’écoles, l’instruction de la jeunesse, sont demandées par plusieurs corporations, notamment par celle des marchands merciers, grossiers, ferronniers et des peintres-verriers. En 1592, un règlement supprime toutes les écoles de grammaire qui, étaient vides alors, par suite des événements désastreux des années précédentes. On voulait fonder un collège-séminaire. L’ancien collège serait supprimé, il n’y aurait plus ni régents, ni écoliers. Dans le nouveau, pour l’enseignement il y aurait une chapelle, un principal marié, un prêtre abécédaire, 4 régents de grammaire portant bonnets et robes pendant leurs classes. «  Les élèves devaient porter robe longue ou manteaux zonés avec le bonnet, comme en collège bien institué, et ceux de la ville, allant aux leçons, porteraient au moins le bonnet ». Les enfants pauvres de la ville seraient instruits gratuitement et inscrits au bureau de l’Aumône générale. Il y aurait 3 pensions : l’une de 26 écus, la 2° de 33, et la 3° de 40. A l’égard des écoles où l’on enseignait à lire, écrire et jeter (compter avec des jetons), le nombre « effréné » qui existait devait être réduit et réglé sur celui des paroisses. Dans ces écoles, les maîtres ne pourraient enseigner la grammaire, ils devaient conduire leurs élèves à la messe les dimanches et fêtes.

 

Vers 1615, les Jésuites voulurent établir un collège. Ils avaient été attirés à Troyes par l’évêque René de Breslay. Une députation du chapitre cathédral et du corps de ville fut envoyé au roi, qui déclara au doyen du chapitre, en 1624 : « Je ne veux pas qu’il y ait collège ni maison des pères Jésuites en ma ville de Troyes. Ils vous reporteront, à votre retour, les clefs du logis où ils y sont à présent demeurant, mais pourra l’évêque en avoir quelquefois, si bon lui semble, 1 ou 2 à sa suite, pour l’assister en ses fonctions spirituelles ».      

 

Par testament de 1617. François Pithou, seigneur de Bierne, avocat au parlement, maître des Requêtes du roi en son hôtel de Navarre, lègue sa maison en face Saint-Remy, sa bibliothèque, tous ses meubles, l’or et l’argent qu’il pouvait posséder, et tous les héritages qu’il avait en la paroisse de Moussey, pour la fondation d’un collège, sous la condition expresse que les Jésuites en soient formellement exclus, sans quoi, tout serait vendu et le produit employé au profit des pauvres.

 

Louis XIII, venant à Troyes en 1630, met les Oratoriens à la direction du collège, qui prospère rapidement. A leur arrivée, il y avait une centaine d’élèves, et en 1649, 418 répartis en 9 classes, venant de toute la Champagne.

 

En 1661, Jacques Hennequin, prêtre de l’Oratoire, docteur en théologie, fonde un second cours de philosophie et une leçon de théologie, 2 heures chaque jour. Les Oratoriens exercent leurs élèves à soutenir des thèses, à réciter des morceaux de poésie et à jouer des pièces de théâtre. Au XVII° siècle,  on voit renaître les écoles primaires, que l’on appelait « les Petites Ecoles ». Au XVIII° siècle, il y eut une renaissance en faveur de l’instruction populaire. En 1678, l’établissement des sœurs noires, fondé pour les petites filles, fut dispersé en 1749 lors des persécutions contre les jansénistes. En 1702, s’installèrent les frères de la doctrine chrétienne. En 1719, il y avait 3 écoles de frères. Ils distribuaient gratuitement l’instruction aux enfants des artisans et des pauvres. En 1726, on reproche aux Ursulines de n’admettre que des jeunes filles appartenant aux classes aisées. En 1770, elles comptaient en ville 6 écoles et y recevaient 700 enfants. Le 5 avril 1780, on ouvrit une quatrième école dans la rue de l’Eau Bénite, en la paroisse de Saint-Pantaléon. En 1779, il n’est ouvert plus que 4 écoles, et en 1789, que 3. Le collège de Pithou continua sa carrière florissante jusqu’en 1792, comptant toujours de 3 à 400 élèves. Autour du collège vivaient un grand nombre d’écoles.

 

Il y avait des établissements d’un autre genre, les « Orphelinats », donnaient aussi l’instruction élémentaire, de même les Filles de la Charité.

 

En 1772, de généreux bienfaiteurs fondèrent l’école gratuite de dessin.

 

En 1773, le collège des chirurgiens ouvrit un cours où leur art était enseigné.

 

La même année fut fondée une école d’accouchement.

 

En 1778, la ville établit une école près de l’hôtel de ville.

 

L’enseignement sous Louis XIV et sous Louis XVI reçut un développement considérable. Les bienfaiteurs de l’Instruction sont très nombreux, ce mouvement généreux est fort remarquable. On donnait alors pour l’enseignement, comme au moyen-âge, on léguait aux établissements religieux, et, avec ces dons, la gratuité de l’enseignement était presque toujours une condition absolue. L’ordonnance d’Orléans, sur la demande de la noblesse, celle de Blois, par le Concile de Trente, firent une loi expresse de la gratuité de l’enseignement. Cette loi fut la règle commune et générale à Troyes, pendant au moins 4 siècles, sans compter les écoles ouvertes par l’Aumône générale aux enfants pauvres. Les faits se résument ainsi : création d’une instruction populaire et publique au XV° siècle, apogée au XVI°, déclin au XVII° et renaissance pénible au XVIII°.

 

En 1792, la Révolution supprimant tous les ordres religieux, 12 pères de l’Oratoire, professeurs, sont mis à la retraite. Le collège est alors repris par la ville, mais la plupart des parents retirent leurs enfants, et l’établissement est presque désert à la fin de la Terreur.

 

La loi du 3 brumaire an IV (25 octobre 1795), détermine les trois sortes d’écoles : primaires (Dessin, Histoire naturelle, Langues anciennes), centrales (Mathématiques, Physique et Chimie) et spéciales (Grammaire générale, Belles-Lettres, Histoire et Législation).

 

Par arrêté du gouvernement, en date du 12 Germinal an XII (3 avril 1801), la ville est autorisée à établir une école secondaire, qui prend le nom de Collège, à la Restauration.

 

En 1834 est instituée une Ecole commerciale annexée au collège.

 

En 1853, un arrêté du ministre donne à tous les lycées, le titre de lycées impériaux. L'ancien collège devient en 1861, le lycée impérial Pithou. Le vieux collège démoli en 1862, est remplacé par un marché couvert. Le Lycée qui l’a remplacé, a été bâti sur l’emplacement de la première gare du chemin de fer de l’Est, et a été ouvert à la rentrée d’octobre 1861.

 

 

 

D’illustres Champenois ont fréquenté le collège de Troyes :  

 

- Eustache Le Noble écrivain fécond et brillant (1643-1711),

 

- Pierre-Jean Grosley, historien local (1718-1785),  

 

- l’académicien François Boutard (1664-1729) « l’héritier d’Horace, le poète des Bourbons », gratifié d’une pension par Louis XIV.

 

- Nicolas Henrion (1663-1720) numismate, professeur au Collège de France, membre de l’Académie des Inscriptions.

 

- Pierre-Alexandre Levesque de la Ravalière (1697-1762), membre de l’Académie des Inscriptions, avec ses travaux sur la littérature du moyen âge et sa belle publication des poésies du roi de Navarre.

 

- L’avocat Jean-Baptiste Grosley (1718-1785), membre de l’Académie des Inscriptions.

 

- Jean-Charles Thiébault de Laveaux (1749-1827), lexicographe éminent, écrivain d’une fécondité incroyable.

 

- Magloire Thévenot (1746-1821), grammairien.

 

- Edouard Thomas Simon, dit Simon de Troyes (1740-1818), qui traduit les grecs, les latins et les italiens, bibliothécaire remarquable, professeur de Belles-Lettres.

 

- Pierre Mathias Charbonnet (1733-1815), recteur de l’Université de Paris.

 

         - Courtalon-Delaistre (1735-1786), auteur de l’excellente Topographie du diocèse de Troyes.

 

- Louis Duballe (1702-1770), qui compose une histoire de Troyes en 3 gros volumes, " chercheur de vieux documents ".

 

- L’avocat Michel Semillard (1729-1796), qui laisse 9 in-folios de mémoires historiques sur la ville de Troyes.

 

         - François Girardon (1628-1715), renommé sculpteur.

 

         - Jacques Nicolas Paillot de Montabert (1771-1849), grand artiste troyen, qui devint " le plus savant de tous les peintres, auteur du Traité complet de la peinture ".

 

- Nicolas Desmarets (1725-1815), membre de l’Académie des sciences, " l’un des hommes qui par leurs découvertes, ont le plus contribué au développement de notre industrie nationale ".

 

- J-B. Ludot (1703-1771), mathématicien. " Des expériences qu’il fit sur son propre corps par rapport au froid et au chaud hâtèrent sa fin. Ainsi, il entrait dans un four et s’y tenait un temps considérable. Pendant l’hiver, il se jetait et plongeait dans la Seine gelée et y soutenait le plus longtemps possible la fermentation de la glace ".

 

- Claude Louis Huez (1724-1789), maire de Troyes, lâchement mis à mort par une troupe de bandits.

 

- Georges-Jacques Danton (1754-1794), le grand tribun de la Révolution.

 

- Henri Belgrand, l’un des meilleurs lieutenants de Bonaparte en Italie, gouverneur de Malte.

 

- Des généraux de la République : Nicolas-Benoist de Montmeay, Charles-Louis Songis, Nicolas-Marie Songis (dont Napoléon fit rendre les honneurs du Panthéon), Edouard-François Simon, Denis Desrès, ministre de la marine de Napoléon.

 

 

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