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Le Palais épiscopal de Troyes


L'Evêché avant le XVI° siècle.

L’hôtel épiscopal de Troyes est cité dès 1110, le palais épiscopal en 1153. Aucun chroniqueur, aucune vie de saint, aucune charte ne raconte la construction de l’ancien évêché. Il ne semble pas qu’elle ait pu avoir lieu avant la séparation des menses épiscopale et capitulaire, qui passe pour s’être faite vers la fin du XI° siècle. L’évêque de Troyes Philippe de Pons (1081-1121) donna en 1104 un acte pour l’abbaye de Molesme au chapitre cathédral, où il dit résider dans une autre charte de 1108. En 1110 il donnait un acte « en notre hôtel ». L’évêque de Troyes devait alors avoir sa propre résidence, séparée du chapitre cathédral, c’est-à-dire, au sens propre du terme, son évêché. En 1140 et 1147, l’évêque de Troyes Hatton (1122-1146) date une charte « en l’hôtel de l’évêché ». Le choix de ce terme montre qu’il s’agit non d’un domicile privé de l’évêque, mais de sa résidence officielle, l’évêché. En 1150 comme en 1158, son successeur Henri de Carinthie (1146-1169) use de la même expression, mais en 1153 comme en 1155 il datait des actes de « notre palais épiscopal », comme son successeur Matthieu (1169-1180). Dès 1153, l’évêque de Troyes résidait donc en son « palais épiscopal ». Philippe de Pons est le premier évêque de Troyes à avoir eu sa propre résidence, séparée de celle du chapitre cathédral, et il dut donc construire le premier hôtel épiscopal. Le grand seigneur évêque Henri de Carinthie, troisième fils d’Engelbert II, duc de Carinthie et frère de Mahaut de Carinthie, épouse du comte Thibaut II de Champagne, qui l’appela en 1146, sur le siège de Troyes, a donc pu faire construire un palais épiscopal. La construction de l’évêché date de plusieurs époques, très postérieures à celle de la cathédrale. Il s’élève sur l’emplacement de la demeure qu’habitèrent les évêques de Troyes jusqu’au commencement du XVI° siècle. D’après les documents de cette lointaine époque, les évêques occupèrent jusqu’au XVI° siècle, un logement de dimensions assez restreintes, auquel on donnait, suivant l’usage du temps, le nom d’hôtel épiscopal. En 1374, il est qualifié de nouvel hôtel, ce qui n’empêche pas que des réparations y soient déjà nécessaires. Henri de Poitiers (1352-1370) ne les avaient pas terminées à sa mort. Son successeur Jean de Braque (1370-1375) se vit obligé de les exécuter, mais il en réclama le prix à Charles de Poitiers, neveu et héritier du prélat défunt. L’évêque avait sa chambre au-dessus d’une salle basse, la chapelle ou oratoire donnait sur le jardin. Comme le reste de l’édifice, elle n’avait aucune peinture, on y accédait par un escalier en pierre. En 1376, la chapelle reçut une cloche. Il ne se passe guère d’années où l’on ne travaille à l’hôtel épiscopal. Pour arriver de la salle à la chambre de l’évêque, il fallait monter plusieurs degrés en bois. Au rez-de-chaussée se trouvent la cuisine, une chambre contigüe avec cheminée, une grande salle, la chambre de l’évêque, la chambre du maître d’hôtel, le garde-manger, le charbonnier, un écritoire ou bureau, la chambre des chapelains, une dépense, un cellier contigüe, la chambre aux avoines, le jeu de paume, la prison et les écuries des chevaux. L’étage comprenait la chambre haute de l’évêque, une chambre au-dessus de la cuisine, une grande salle au-dessus de la prison, la chambre aux seigles et celle au foin. Il y avait en outre, la salle du registre, la chambre de la plaidoirie. Ces salles étaient carrelées. La grande salle était éclairée par une fenêtre flamande d’où l’on avait vue sur la maison de l’abbé de Montier-la-Celle. Le prélat fit construire un préau du côté du jardin. Le jardin épiscopal donnait, sur le chauffour de la cathédrale, espace vide qui séparait l’église de la rue des Trois-Godets. Dans le jardin se trouvait le puits. Un autre existait tout près de la cathédrale. Un colombier s’élevait dans la cour. Au XIV° siècle, la prison de la Sale ou auditoire contiguë à l’évêché avait pour gardien le concierge. Les prisonniers n’avaient pour couche que de la litière que l’on renouvelait de temps en temps. On les enterrait ainsi que les suicidés dans un cimetière, lieu dit le jardin au Clerc, près de Jaillard. Une partie de la prison était appelée vulgairement la chambre aux prêtres. La garde des prisonniers était confiée à un geôlier, qui habitait au XVI° siècle, dans une chambre séparée. Jusqu’à l’épiscopat de Louis Raguier (1450-1483), l’évêché occupait l’espace compris entre la ruelle de l’Evêché et la rivière de Meldançon, la cathédrale et la rue de la Crosse. La rivière était en dehors du jardin. Les dépendances furent agrandies par l’évêque Louis Raguier. En 1458, l’hôtel de la Crosse lui fut donné.

L'Evêché au XVI° siècle.

La partie la plus ancienne de l’évêché actuel remonte à l’épiscopat de Jacques Raguier (1483-1518). Son successeur Guillaume Parvi (1518-1527), n’eut qu’à achever l’œuvre commencée, on pose ses armoiries dans sa chambre, l’auditoire est démoli et changé de place avec sa galerie et ses armoiries y sont placées à côté de celles du chapitre Saint-Pierre, il fait faire une cheminée dans la salle basse, ouvrir des fenêtres dans la bouteillerie, une porte dans la bibliothèque... L’évêque Hennequin (1527-1544), « a fort amplifié les logis de l’évêché, à Troyes, à Saint-Lyé. C’est pour ce motif que son blason a été substitué à un autre, au-dessus de la porte ancienne qui s’ouvre au rez-de-chaussée de l’évêché sur la cour. Les armes se trouvent répétées 3 fois sur la grande plaque de la cheminée, qui orne la salle synodale. Le mur du premier étage sur la cour est composé en partie de craie et briques plates, le damier champenois. Sous l’évêque Louis de Lorraine (1544-1550), ses armoiries sont conservées dans le mur, sur le jardin. Cette partie de l’évêché « a servi aux conciliabules de l’évêque Antoine Caracciole (1550-1562), avec les Calvinistes et de retraite au duc de Chevreuse pendant l’expédition de la Saint-Lambert ». C’est là aussi qu’étaient logés ordinairement les gens de la maison du roi, ou des princes, qui descendaient à l’hôtel épiscopal à leur passage à Troyes. Sur une des portes du grenier, on lit ces mots appliqués à l’encre : « Deux valets de pied de M. de la Rochefoucaut ». Des changements assez considérables furent apportés dans la disposition des bâtiments par ordre de Mme Vignier, mère de l’évêque (Jacques Vignier 1621, décédé en 1622 à 22 ans). Cette dame ne perdit pas de temps. Pendant les quelques mois qui s’écoulèrent  entre la nomination et le mort prématurée de son fils, elle fit approprier à la hâte les bâtiments selon son goût.

L'Evêché au XVII° siècle.

L’évêché actuel occupe un emplacement plus étendu que l’ancien. Il le doit à Mgr Malier qui, dès le commencement de son épiscopat (1641-1678) travailla activement à agrandir son domaine. Il demanda d’abord l’aliénation à son profit d’une rue qui séparait des bâtiments d’un petit jardin de l’évêché. Cette rue pouvait être supprimée avec d’autant moins d’inconvénients que plusieurs autres rues, celles des Oiseaux, des Trois-Godets, des Enfants-Sans- Souci, de la Courtine ou de l’Ecorcherie, desservaient les maisons du quartier. Le terrain en serait pris pour rendre le jardin épiscopal plus régulier et plus vaste. Cette rue est désignée sous le nom de rue de l’Evêché. Dans le placet soumis au roi, il est dit qu’elle prenait au coin de la rue de la maison de la Crosse, rue des Oiseaux, pour aboutir à la rue des Trois-Godets, longeant la chapelle de l’évêché et un vieux bâtiment à l’extrémité de la grande salle dit le colombier. Après avis favorable donné par le Conseil de ville, le roi acquiesça à la requête et la rue fut supprimée. L’entreprenant prélat acquit en outre les terrains avoisinant son palais pour l’agrandir. Il acheta le même jour (19 juin 1644), 3 maisons, une sise près du pont Rognon, une dans la rue de la Ganguerie et une contiguë à l’hôtel de la Crosse. Un mois après, il se rendit acquéreur de 4 maisons de la rue de la Ganguerie. Dans la même rue, une partie de la maison, propriété de Louis de Villeprouvée, seigneur de Villette, lui convenait, il l’acheta le 13 avril 1645 et, l’année suivante, fit l’acquisition de la maison qui se trouvait à vendre. Tout à côté de la rue de la Ganguerie, depuis le pont Rognon,  fut successivement acquis : le 29 septembre 1646, la moitié de la maison de François Filiastre, le 19 juillet 1649, ce sont 3 maisons, dont l’une est située dans la rue de la Courtine, autrement dite de la Ganguerie et attenante à la précédente. C’est le même jour encore, une maison avec son jardin dans la même rue et une maison dans la cour de la Belle-Colette. Enfin 3 bâtiments en ruine situés dans la cour Vinot. Tous ces bâtiments étaient attenants les uns aux autres. Une maison, sise au nord du palais épiscopal, est à vendre en 1650. Mgr Malier s’en rend acquéreur ainsi que d’une autre, que lui cèdent les maîtres tonneliers Pilliards. Ces constructions, dont quelques unes faisaient partie du domaine de l’évêché avant l’aliénation de 1567, furent abattues, et l’emplacement ainsi que la rue supprimée servit à l’agrandissement du jardin épiscopal. Le grand bâtiment élevé par Mgr Malier, sur les plans du chanoine Maillet, ressemble aux édifices de l’époque Louis XIV. La façade est surmontée d’un fronton surbaissé au milieu du couronnement. 2 lions posés de face sont sculptés dans le fronton. 7 fenêtres éclairent chaque étage. Les ouvertures du rez-de-chaussée sont en plein-cintre. Les 2 écuries refermaient alors 9 chevaux : 4 de carrosse, 4 de charrette et 1 de selle. La chapelle était sous le vocable de Saint Jean-Baptiste. C’est dans cette chapelle que, lors de l’incendie du grand clocher de la cathédrale, le 8 octobre 1700, les chanoines reprirent, après 2 jours d’interruption, le service divin qu’ils y célébrèrent jusqu’au 19 mars 1701.

L'Evêché depuis la révolution.

A la Révolution, Mgr Claude de Barral (1761-1790), évêque démissionnaire, et son neveu, Louis Mathias de Barral (1790-1801), occupaient l’évêché. Le 11 mars 1791, l’évêque titulaire préféra quitter la ville plutôt que d’attendre son expulsion, à cause de son refus du serment. L’évêque intrus de l’Aube tenait de la constitution civile, le droit d’être logé. Il s’installa sans retard à l’évêché vacant. La nouvelle loi réglait que le Séminaire serait établi, autant que possible, « près de l’église cathédrale et même dans l’enceinte des bâtiments destinés à l’habitation de l’évêque ». Voulant se conformer à cette disposition constitutionnelle, le faible évêque Sibille demanda, le 15 mai1791, au Directoire, de s’occuper de l’appropriation des salles pour placer les séminaristes. Le Séminaire resta à Notre-Dame-en-l’Isle, seuls les directeurs furent changés, pour n’avoir pas voulu prêter le serment schismatique exigé des fonctionnaires. Cependant, l’évêque Sibille ne jouit pas longtemps de son logement. La loi du 25 juillet1792 trouva que les palais épiscopaux étaient trop étendus pour les évêques et, sous prétexte d’économie, décida que ces palais seraient mis en vente. En conséquence, Sibille se retira sur la paroisse de Saint-Nizier et, comme l’Hôtel-Dieu ne suffisait plus à contenir tous les soldats malades, la commune proposa au Directoire, d’établir un hôpital. Par suite de l'application de la loi des suspects, plusieurs prêtres insermentés furent arrêtés. Une chambre de l'évêché leur fut affectée pour prison. On leur adjoignit sous la Terreur, des laïcs des deux sexes, sans se préoccuper d'établir une séparation entre les uns et les autres. L'hiver 1798, d'autres pièces servirent de casernement pour les troupes. Quant au jardin, le Département le mit à la disposition de l'école centrale pour servir de jardin des plantes. Le Concordat rendit aux évêques la jouissance des palais épiscopaux. Fort heureusement, l'év^ché de Troyes n'avait pas été aliéné. Mgr de la Tour du Pin y installa les séminaristes à côté de lui. Ils y entrèrent le 18 août 1803. Pendant la guerre, tous les bâtiments servirent à loger les soldats blessés. Un hôpital provisoire y fut installé. Des travaux importants furent exécutés en 1823. La chapelle qui avait aussi servi d'hôpital, avait bien été restaurée. C'est Mgr Cœur (1849-1860) qui fit disposer l'évêché dans son état actuel. En 1853, on installa un calorifère. Deux ponts furent jetés sur la rivière, et une salle de bain aménagée. C'est Mgr Ravinet (1861-1875) qui rapporte des jardins du Vatican une bouture de tilleul qui, plantée dans la cour d'honneur, est aujourd'hui un très bel arbre !     

Le bâtiment de l’Ancien Evêché de Troyes devient propriété du département de l’Aube. Dès 1958, l’Inspecteur de l’Académie se préoccupe de l’amélioration et de la présentation du vestibule et du bel escalier conduisant à ses services. Les travaux ne sont engagés par M. Pierre Denizot, préfet de l’Aube, agissant pour le compte du département, qu’en 1968. La découverte d’éléments  anciens d’architecture intervient alors. Il s’agissait d’éléments romans. La présence de 2 bancs de pierre dans l’ébrasement confirme l’époque. La base, le fût et le chapiteau à volutes rudimentaires, les tores de la voussure des arcatures prouvent que l’ouvrage est dans la période romane. Les fouilles archéologiques entreprises en 1980, à l’occasion de la mise en place du Musée d’Art Moderne, constituent un ensemble historique, avec la mise en lumière de toutes les richesses archéologiques : vestiges de sous-bassement gallo-romains, reste d’une baie monumentale, plafonds gothiques, maçonneries en appareillage de damier champenois, l’imposante cheminée en chêne sombre du XVII°  siècle, le jardin à la française, le petit pont conduisant à l’ancien lavoir de l’évêché, avec tourelle, dans la cour d’honneur, magnifique tilleul provenant d’une bouture rapportée des jardins du Vatican par Mgr Emanuel-Jules Ravinet, évêque de Troyes (1861-1875).   

Grâce au financement de la Ville (1979-1981),  le Musée d’Art Moderne de Troyes s’installe dans l’Ancien Evêché, inauguré le 20 octobre 1982, par Monsieur François Mitterrand, Président de la République.

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