Politique



Le sacre et le couronnement de Louis XVI  


Le 5 juin 1775, à 2 heures, le roi quitta Versailles pour se rendre à Reims. Il était accompagné de la Reine, de Monsieur, de Madame et du Comte d’Artois. Il arriva à Compiègne vers 10 heures du soir. Le duc de Gesvre, gouverneur de la province d’Ile-de-France, le reçut selon l’usage, entouré de l’état-major, du Corps de ville et du régiment de Condé-Cavalerie. Sa Majesté quitta Compiègne le 8 juin, passa à Soissons où les clefs de la ville lui furent présentées. Elle arriva ensuite à Fismes où elle coucha. Le lendemain 9 à 2 heures, nouveau départ et arrivée à Reims vers 3 heures.

 

Le cortège officiel s’était formé à une certaine distance de la ville. Il comprenait, avec l’élément militaire et religieux, les corps constitués, la noblesse de Cour et celle de la plupart des provinces accréditées auprès de Sa Majesté. Après avoir passé sous les arcs de triomphe, le roi descendit à l’Eglise métropolitaine où il fut reçu par l’Archevêque duc de Reims, assisté de l’Archevêque de Trajanople, son coadjuteur, et du Chapitre. Sa Majesté assista au Te Deum chanté au bruit de plusieurs salves d’artillerie, et déposa sur l’autel un magnifique ciboire en or, du poids de 16 livres, dont il fit présent à l’église. Accompagné de la Reine, il se retira dans les appartements qui lui étaient réservés à l’Archevêché et qui avaient reçu un luxueux aménagement, provenant du garde-meuble de la Couronne. Le Chapitre, le Corps de Ville, le Présidial, l’Election et l’Université présentèrent ensuite leurs hommages au roi et à la reine.

 

         Le lendemain 10, Louis XVI, suivi des hauts personnages qui ne le quitteront pas pendant cette longue solennité, assista à la messe dans la chapelle du Palais épiscopal, et aux premières vêpres du Sacre à l’église métropolitaine où l’Archevêque d’Aix prononça un sermon fort éloquent et pathétique, dont le texte était ; « Un roi sage montera sur le trône et il y règnera dans la justice et dans l’équité ».

 

La cérémonie du sacre et du couronnement de Louis XVI dépassa par sa magnificence le fameux sacre de Louis XV.

 

         Une relation de cette fête qui eut lieu en l’Eglise métropolitaine de Reims, le dimanche 11 juin 1775, a été décrite par un Troyen qui y assistait, en tant que délégué de la Municipalité de Troyes :

 

« Le dimanche 11, jour du Sacre et du Couronnement, vers 6 heures du matin, le clergé prit place dans l’église. Ce furent déjà les chanoines, en chape, l’Archevêque de Reims,, les chantres, l’ancien évêque de Limoges, les évêques de Meaux, Arras, Montpellier, Amiens, Soissons en mitres, des cardinaux, des archevêques invités, tous en vêtements pontificaux, le doyen du Conseil, les conseillers d’état, Turgot, ministre d’état et contrôleur général des finances. Les pairs ecclésiastiques arrivèrent en chape et en mitre, précédant les pairs laïques vêtus d’une veste d’étoffe d’or, d’un manteau ducal de drap violet bordé et doublé d’hermine avec sur la tête la couronne d’or. L’évêque duc de Laon et l’évêque duc de Beauvais, députés pour « aller quérir le roi », partirent en procession précédés des chanoines, de la musique et du marquis de Dreux, Grand maître des cérémonies. Arrivés à la porte du roi, le chantre frappa de son bâton. L’évêque, duc de Laon, dit qu’il demandait le roi. Le duc de Bouillon, grand chambellan de France, répondit qu’il dormait. Le chantre frappa une deuxième fois, puis une troisième et les portes de la chambre furent ouvertes. Le marquis de Dreux conduisit les 2 évêques auprès de Sa Majesté qui était couché sur un lit magnifique et vêtu d’une longue camisole de satin cramoisi garnie de galons d’or et ouverte, ainsi que sa chemise, aux endroits où il devait recevoir les onctions. Le roi avait pardessus, une longue robe de toile d’argent, et sur la tête, une toque de velours noir, garnie d’un cordon de diamants, d’un bouquet de plumes et d’une double aigrette blanche. Les 2 évêques conduisirent le roi en procession à l’église. Il était 7 heures quand le cortège arriva dans la grande nef où s’étaient rangés les tambours, les hautbois et les trompettes. Le roi prit place sur un fauteuil sous un dais. La sainte Ampoule apportée de Saint-Remy par Dom de Bar en chape d’étoffe d’or et monté sur un cheval blanc de l’écurie du Roi, fut remise à l’Archevêque duc de Reims. L’Evêque duc de Laon et l’Evêque comte de Beauvais soulevèrent Louis XVI de son fauteuil pour demander « le consentement de l’assemblée et du peuple ». Cette formalité remplie, le roi, les mains sur l’Evangile fit les serments de maintenir la paix dans l’Eglise de Dieu, d’exterminer les hérétiques, de gouverner avec justice et miséricorde, puis il s’agenouilla. Le duc de Bouillon lui enleva sa longue robe, le chaussa de bottines de velours violet, fleurdelisé et ne lui conserva que sa camisole de satin. Monsieur, représentant le duc de Bourgogne, lui mit des éperons d’or, et les lui ôta aussitôt. L’Archevêque duc de Reims fit alors la bénédiction de l’épée de Charlemagne, la ceignit au roi, la reprit, puis, l’ayant tirée de son fourreau il dit une oraison et la remit toute nue entre les mains de Sa Majesté qui l’offrit à Dieu en la posant sur l’autel. L’Archevêque officiant la remit au roi agenouillé et le Maréchal de Clermont-Tonnerre la reçut ensuite des mains du roi pour la tenir pointe levée pendant toute la cérémonie du sacre, du couronnement et pendant le festin royal.

 

         L’Archevêque, duc de Reims retourna à l’hôtel, prit la patène d’or du calice de Saint Remy sur laquelle il mit de l’huile de la Sainte-Ampoule, qu’il mêla avec du Saint-Chrème et fit au roi prosterné devant lui, 9 onctions sacrées. L’officiant ferma les ouvertures de la camisole et de la chemise du roi et le duc de Bouillon couvrit celui-ci du manteau royal de velours violet bordé de fleurs de lys d’or, fourré et bordé d’hermine.  Enfin l’Archevêque de Reims fit à Louis XVI les 2 dernières onctions aux paumes des mains et lui remit ses gants, l’anneau, le sceptre royal et la main de justice.

 

         Le roi était sacré !

 

         Le couronnement eut lieu immédiatement après. Le sieur Hüe de Miromesnil, garde des Sceaux de France, faisant fonction de chancelier, monta à l’autel le visage tourné vers le chœur, il appela les Pairs laïcs et ecclésiastiques et les pria de s’approcher du roi. L’Archevêque duc de Reims prit alors sur l’autel la grande couronne de Charlemagne, apportée de l’église Saint-Denis, la bénit, et la posa sur la tête du monarque. Les pairs laïques et ecclésiastiques y portèrent la main pendant que l’Archevêque récitait les oraisons du couronnement. Le roi tenant le sceptre et la main de justice monta ensuite au jubé, s’assit sur son trône et l’officiant récita les prières de l’intronisation. Les prières terminées, l’Archevêque baisa le roi. Les pairs de France le baisèrent également, puis les portes de l’église furent ouvertes. Le peuple y entra en foule et fit paraître les sentiments les plus vifs de respect et d’amour par des acclamations et des cris de joie qu’accompagnaient des fanfares, des trompettes et des hautbois. Des oiseleurs lâchèrent une grande quantité d’oiseaux, les Gardes françaises et suisses exécutèrent une triple salve de leur mousqueterie et pendant les acclamations de « Vive le Roi », les hérauts d’arme distribuèrent des médailles d’or et d’argent, frappées à l’occasion de la cérémonie. Après le Te Deum, au son des cloches de la ville et au bruit des salves d’artillerie, l’Archevêque duc de Reims commença la messe, remit au roi la bourse, le pain d’or, le pain d’argent, le vase rempli de vin et le fit communier sous les 2 espèces. A 11 h 30, le roi retourna en grande pompe au palais archiépiscopal, la Sainte Ampoule fut reconduite à l’Abbaye de Saint Remy et le cardinal de La Roche Aymon, grand aumônier de France, brûla les gants et la chemise qui avaient touché aux onctions. Ce fut ensuite l’instant du dîner royal. 5 tables avaient été dressées pour les convives. Le duc de Cossé, premier panetier de France, fit mettre le couvert du roi par le marquis de Verneuil, premier échanson, qui apporta la soucoupe, les verres, les carafes, et le marquis de la Chesnaye, premier écuyer tranchant, apporta la grande cuiller, la fourchette et le grand couteau. Sous la direction du marquis de Dreux et du prince de Soubise, le premier service fut apporté dans l’ordre suivant : les hautbois, les trompettes et les flûtes de la Chambre jouant des fanfares, les Hérauts d’armes, les 2 maîtres de cérémonie, les 2 maîtres d’hôtel du roi, le duc de Cossé tenant le premier plat et les gentilshommes servants de Sa Majesté, et toute la noblesse, et tous les hauts dignitaires présents au sacre se retrouvèrent dans la salle du festin quand le roi arriva, accompagné de Monsieur et de Monseigneur le Comte d’Artois. Les insignes de la royauté furent déposés aux coins de la table et le duc de Reims récita le benedicite. Le prince de Lambesc se mit derrière le fauteuil de Sa Majesté, aux côtés se placèrent le duc de Noailles et le prince de Beauvau. Le prince de Soubise présenta la serviette au roi et se tint debout près de la table. Le premier panetier, le premier échanson et le premier écuyer tranchant se placèrent devant le roi pour remplir leurs fonctions.

 

Le dîner terminé, les hérauts d’armes jetèrent une somme considérable au peuple attroupé, tant aux portes de l’église que dans les cours du palais archiépiscopal.

 

Vers le soir, le roi et la reine se montrèrent au peuple enthousiasmé.

 

La journée se termina par une illumination dans la ville et par des démonstrations de la joie la plus franche et du bonheur le plus vif ».

 

         La reine qui n’avait eu, en cette circonstance, que le rôle de spectatrice, ne put contenir son émotion au moment du sacre et  rappelant cette solennité, elle se serait écriée : « La belle journée, je ne l’oublierai de ma vie ! ».

          La musique d'accompagnement est la véritable musique du sacre de Louis XVI

 

 


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