Guerres et occupations...



Le monument de la Résistance auboise


          Rappelons globalement le tribut du sang et des souffrances que l’Aube, entre juin 1940 et août 1944 a apporté à cette Grande Cause qui s’identifie à la cause même de la Patrie. Ce pieux pèlerinage à travers les rangs de nos morts et de nos martyrs justifie, le pourquoi de ce Monument, l’ardeur avec laquelle il a été voulu et défendu, et inauguré d’une façon hors de pair.

 

         Pendant l’occupation de notre département, les Allemands ont procédé à environ 1.300 arrestations, 28 français ont été fusillés à titre d’otages, 30 personnes ont été condamnées à mort par le Tribunal Militaire Allemand de Troyes,

410 Aubois ont donné leur vie à l’occasion des combats entre la Résistance et les Troupes d’occupation, de très nombreuses maisons d’habitation et 22 villages ont été incendiés, 54 communes ont souffert du pillage, la Gestapo de Troyes a torturé affreusement les personnes qu’ils interrogeaient au siège Boulevard Gambetta, à la Maison d’Arrêt, à Mussy-sur-Seine…

 

         Devant tant de drames accumulés et trop rapidement évoqués, mais aussi déjà trop oubliés par certains, l’idée est venue de créer un Monument pour perpétuer le souvenir de tant de sacrifices et exalter l’idéal pour lequel ils ont été consentis…

        

         C’est en automne 1947, au sein du Comité de la Fédération Nationale des Déportés, Internés, Résistants et Patriotes de l’Aube, que l’idée prend corps. Un Comité provisoire est constitué qui sera présidé à partir de 1954, par M. Henri Terré, Maire de Troyes et Président du Conseil Général, et comprenant MM. Alric et Patenôtre sénateurs, les députés André Mutter, Germain Rincent, Marcel Noël et Louis Briot, ainsi que tous les délégués des mouvements de la Résistance, F.F.I., Résistance Fer, Déportés, Veuves de Déportés, Familles de Fusillés, Commandos M.C.R., C.V.I., C.I.L., Libé-Nord, F.T.P….

 

Le prix du Monument est fixé à 10.000.000 de francs. Le Préfet de l’Aube Marcel Wiltzer pense que le seul moyen de réaliser cette somme importante est le recours à une grande loterie départementale, en émettant 100.000 billets à 100 fr. Plus de 1.000 lots d’une valeur commerciale d’au moins 1.000 fr par lot au minimum, sont très rapidement offerts par les industriels, commerçants, artisans, agriculteurs… avec comme gros lots : une voiture Vedette Versailles, une voiture Berline de luxe Aronde, 5 scooters Lambretta, une cyclorette Terrot, 3 bicyclettes Terrot, un chronomètre Lip. Tous les billets ont été placés, vendus et payés !

 

Le planning est que le Monument doit être érigé pour le 10° anniversaire de la Libération de Troyes, soit en 1955. Le 13 mars, l’emplacement est définitivement choisi : sur le Jardin du Rocher, face la Fontaine Argence. L’inscription retenue est : " Médite et souviens-toi ".

 

Les numéros des billets gagnants sont tirés lors d’un immense gala dans la salle des fêtes de Sainte-Savine, le 8 mai, au cours d’un très grand spectacle, avec des artistes et chanteurs de l’ABC, du Lido de Paris, de la Nouvelle Eve, l’orchestre de la radiodiffusion française, Rocroy champion du monde de magie…

 

C’est au Grau du Roi que le sculpteur Jean-Charles Lallement sculpte les deux statues monumentales, dans les énormes blocs extraits des carrières gallo-romaines du Gard. Pendant ce temps, M. Maurice Veyssière élève à Troyes, l’imposant mur de 15 mètres de long.

 

René Coty, Président de la République est pressenti pour l’inauguration, mais son état de santé ne le permet pas. C’est donc le Préfet Marcel Wiltzer, qui s’est beaucoup impliqué pour l’érection de ce monument, qui est choisi pour l’inauguration.

 

Le 26 septembre 1955, c’est l’arrivée des 2 énormes convois. Le résistant a été taillé dans une pierre unique de 27 tonnes ! Le gisant a été sculpté dans un bloc de 15 tonnes. L’opération de déchargement est une manœuvre spectaculaire, sensationnelle, suivie par de très nombreux Troyens. Le tout avec le mur du fond est assemblé en quelques heures. La Municipalité s’occupe de procéder à l’environnement.

 

Le 13 novembre est la journée de l’inauguration. Après les cérémonies aux cultes israélite, protestant, catholique dans une cathédrale comble, avec Monseigneur Le Couëdic, il y a un repas de 430 couverts salle des fêtes de l’Hôtel de Ville aux frais de chacun.

 

L’apothéose est l’inauguration proprement dite du monument voilé, pieusement veillé par des déportés et des résistants. La troupe, les musiques de l’Alerte, de l’Armée de Terre, la fanfare de l’Armée de l’Air, la musique de la Garnison de Metz, l’harmonie municipale, les Trompettes Troyennes... Une chorale de 750 exécutants exécutant le chant des partisans, sont des moments grandioses.

 

Une tribune officielle de 300 places est garnie par de hautes personnalités civiles et militaires, venues de toute la France. Les trottoirs, le mail du Cirque, sont trop petits pour une foule compacte de plus de 20.000 personnes.

 

Le Préfet dévoile la statue de 5 m 30 de haut, 1 maquisard et 1 déporté retirent le voile du mur. Dans le ciel 3 avions à réaction de Reims survolent au même moment le Monument.

Des urnes contenant des cendres de déportés et de la terre des Camps de la Mort, sont scellées sur le socle du Monument, aux pieds du Résistant… des couronnes, coussins, bouquets de fleurs sont déposés.

 

Puis ce sont les discours de MM. Terré, Thierry compagnon de la Libération, maire de Sainte-Savine, Wiltzer.

 

Des feux de Bengale embrasent le monument, les cloches de la ville, les sirènes, des salves d’artillerie se font entendre.

 

A 17 h, c’est le défilé militaire, des chars Patton entourent le Monument. C’est un défilé comme jamais vu auparavant (ni depuis !). Puis, c’est la cérémonie aux flambeaux populaires de la Liberté : 4 cortèges, avec chacun 40 sapeurs porteurs de torches, 4 musiques, qui vont aux 4 points cardinaux de l’agglomération, suivis d’une foule immense : Rond point de l’Europe, avenue Pierre Brossolette, Hôtel de Ville de Sainte-Savine et Lycée de Filles avenue Pasteur.

 

A 21 h, feu d’artifice Boulevard Victor Hugo, et à 22 h, grand bal à l’Hôtel de Ville de Troyes. Un bureau de poste temporaire pendant 2 jours, avec oblitération spéciale, se tient au rez-de-chaussée de la Mairie.

 

En conclusion ces cérémonies et ce Monument, sont le couronnement pour notre génération, d’une œuvre grandiose, pour ne pas oublier la Grande Histoire de la Résistance !

 

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